Regard sans complaisance sur le nouvel épisode du conflit israélo-palestinien
Le 19 décembre, l'AFP publiait une dépêche intitulée : L'UE et pays arabes veulent intensifier le
dialogue pour pacifier le Proche Orient (©AFP / 19 décembre 2008 18h23).
Cette dépêche comportait les éléments suivants : "L'Union européenne et les pays de la Ligue arabe ont décidé d'intensifier le dialogue en l'ouvrant,
au-delà des responsables politiques aux membres de la société civile et des communautés religieuses pour contribuer à la paix au Proche Orient", ont indiqué vendredi les participants à trois
jours de conférence euro-arabe à Vienne.
"Nous sommes sur la bonne voie", a assuré le secrétaire général
de la Ligue arabe, Amr Moussa.
Cette conférence de Vienne, qu'il a co-organisé avec l'Autriche, "a ouvert les portes pour l'interaction entre les gouvernements, les ONG, la société
civile et les dirigeants de différentes religions".
M. Moussa a réitéré sa proposition d'inclure ce nouveau groupe de pays
participant au dialogue euro-arabe à l'initiative lancée en juillet par la France, l'Union pour la Méditerrannée (UPM).
"Cela pourrait préparer le terrain pour que les autres membres de la
Ligue arabe puissent aussi participer, peut-être dans un premier temps seulement comme observateurs, aux activités de l'UPM", a ajouté M. Moussa.
La prochaine conférence sur le dialogue euro-arabe, dont la première
édition a eu lieu en février dernier à La Valette à Malte, est prévue en 2009 à Charm el Cheikh en Egypte. "
Après les évènements dramatiques de Gaza, alors que les palestiniens ne disposent d'aucune espèce de capacités
susceptibles de protéger et de soigner les populations contre une attaque militaire d'une telle envergure, qui peut croire encore à la sincérité de ceux qui évoquent, aux USA, en Europe ou au
Proche Orient, des espoirs de paix au Proche Orient ?
De nombreux observateurs de cette crise relèvent que certains acteurs ou observateurs de premier rang instrumentalisent ce nouvel épisode militaire
de la crise !
En premier lieu, la classe politique israélienne qui spécule sur les retombées positives d'une intervention militaire "musclée" à l'occasion des
prochaines élections nationales qui interviendront en février. Une intervention militaire dont il sera difficile de prouver qu'elle n'a pas eu en coulisse les feux verts américain, européen et
égyptien ! Les généraux qui sont à la tête de Tsahal, ensuite, avaient besoin d'une réhabilitation auprès de la classe politique autant que de la population israélienne après l'échec
militaire - certes relatif ! - face au Hezbollah à l'été 2006 ! Cette nouvelle offensive leur en offre l'occasion quand bien même les pertes occasionnées dans la population palestinienne de Gaza
apparaissent considérablement disproportionnées par rapport aux objectifs recherchés (ce qui participent à accréditer l'intérêt de ce nouvel élément des corps de doctrine militaire israélien et
de l'Otan que constitue les missions de combat en zone urbaine avec des règles d'engagement spécifiques) !
Simultanément, le Hamas (dont la création ne doit rien au seul Créateur céleste ...., et qui n'a jamais été favorable à une issue pacifique de la crise),
soutenu à la fois par le Hezbollah et l'Iran, et très probablement par d'autres acteurs qui se dissimulent derrière les précédents mais dont on sent l'empreinte ...., lui en a fourni
l'occasion en multipliant les attaques à l'aveugle sur les communes proches de Gaza ! En grande difficulté politique devant son incapacité à surseoir aux besoins de première
nécessité et, partant, à redonner espoir à des palestiniens ghettoisés dans cette bande de Gaza dépourvue de toutes les ressources vitales, cherche par cette crise à réussir un
tour de passe-passe "existentiel" en remobilisant une très grande partie des palestiniens du Fatah et des populations arabes de la région derrière son étendard anti-israélien !
Ensuite, certains Etats arabes ont probablement cru voir dans ce nouvel épisode un moyen d'accroître leur propre influence dans la région,
soutenus en celà par certains protagonistes de logiques d'influence et de puissance aux visées ambiguës ...
Parmi eux, l'Egypte, qui copréside avec la France, la toute nouvelle Union pour la Méditerranée, et dont la frontière avec la bande de Gaza,
particulièrement poreuse, permet l'alimentation des forces de sécurité du Hamas en armement, redevient un acteur incontournable du processus global de résolution du conflit
israélo-palestinien.
Par contre, d'autres acteurs importants semblent paralysés devant ces événements dramatiques !
D'abord, la Ligue arabe, qui a obtenu une place inattendue dans cette nouvelle entité politique régionale lors du sommet de Marseille des 3 et 4 novembre
2008 (voir lien sur ce blog qui présente le texte de la déclaration finale de ce sommet), quelque peu neutralisée par les contradictions au fond de ses propres objectifs, se trouve en position
délicate !
Ensuite, l'Union européenne, qui souffre désormais de la situation complexe créée à la fois par le refus irlandais de ratifier son traité de Lisbonne, par
son incapacité à faire prévaloir en son sein des postures supranationales prévisibles et affirmées, par l'adoption récente d'une décision du Conseil d'accorder à Israël un statut très
avancé sans exiger simultanément aucune contre-partie politique à la mesure des exigences mêmes de la PESC (*), et par l'irruption dans son propre champ d'intervention
politique et économique d'une Union pour la Méditerranée dont elle ne maitrise ni les objectifs, ni le calendrier, ni les principaux protagonistes, est elle aussi quelquepeu neutralisée !
Pour preuve, alors même qu'elle mène une mission de formation de la police palestinienne (celle-là même qui vient d'être prise pour cible par Tsahal !!),
et que l'OMS et la Croix Rouge internationale reconnaissent l'incapacité des autorités médicales palestiniennes à faire face à l'afflux des victimes des bombardements de Gaza (**), l'UE
s'est contentée jusqu'à la réunion exceptionnelle du Conseil "Affaires étrangères" du 30 décembre de déclarations superficielles qui ont été cruellement à la démesure de ses engagements
récents en faveur d'Israël !
La multiplication de missions PESD tous azimuts (et qui, en prime, ne font l'objet d'aucune véritable évaluation) ne l'a-t'elle pas privée des
moyens requis pour faire preuve de responsabilité politique en proposant à l'ONU de mettre à sa disposition les éléments indispensables au rétablissement et au maintien de la sécurité dans la
bande de Gaza et dans la région frontalière israélienne ? Condition indispensable à la poursuite, et surtout à la conclusion, d'un accord définitif de paix entre un Etat doté de tous les
attributs de souveraineté et un nouvel Etat (cette arlésienne à laquelle on ne cesse de se référer le plus impudiquement du monde !) que la Communauté internationale se doit d'assister dans la
mise en place des conditions de son affirmation autant que de sa viabilité politiques, économiques et sociales !
Pour sa part, l'Union pour la Méditerranée semble totalement absente des débats, comme mue par des ficelles dont les protagonistes ne savent plus
très bien quel rôle lui faire jouer dans le contexte d'une crise grave !
Il est néanmoins permis de s'interroger sur les objectifs autant que sur le calendrier de son irruption sur la scène internationale !
Des esprits particulièrement critiques à son égard se demandent même si, finalement, sciemment ou non, elle n'aurait pas participer à détourner
l'attention des observateurs inattentifs de ce que préparait subreptissement l'Union européenne en Méditerranée au profit d'Israël ! Et si elle ne constitue pas, de facto, une sorte
de leurre, ou pis encore, d' "utopie infériorisante", n'ayant comme seul objectif d'entretenir au sein des populations du Sud et de l'Est méditerranéen l'espoir d'une prospérité, d'une
sécurité, d'une justice et d'une paix à jamais inatteignables en Méditerranée !
Nous sommes nombreux en Europe à ne rien vouloir céder quant à l'existence, à la prospérité et à la sécurité d'Israël tout en ne voulant ne rien céder non
plus quant au respect le plus scrupuleux des droits du peuple Palestinien à bénéficier d'une mise en oeuvre effective - et sans concession - des différentes résolutions du Conseil de
sécurité des Nations unies.
Quant aux propositions pour aider à sortir cette région de sa crise structurelle, il en existe qui me paraissent des plus réconfortantes, et surtout
des plus pertinentes et utiles, à ce stade de la crise.
Parmi elles figurent celle à laquelle j'ai consacré une page spécifique dans mon bloc note, et dont je vous recommande la lecture !
Figure aussi cette recommandation relative à la relance et à l'extension de la mission Rabam Rafah ; recommandation qui est détaillée sur le
site bruxelles2.over-blog.com (dont le lien figure sur mon blog)
D'autres, plus formelles, sont entrain d'émerger en provance des Etats du Golfe, notamment.
La trêve des confiseurs ne saurait servir de prétexte à l'immobilisme des Européens après qu'ils aient été à ce point favorables à l'une des
parties à la crise sans apporter à l'autre partie les garanties politiques minimales autres que de subsistance !
Je formule, à titre personnel, le voeu qu'au cours de l'année 2009, l'ensemble des parties à ce conflit parviennent enfin à trouver les termes d'un
accord formel et définitif (le définitif est-il possible en Méditerranée, et en géopolitique ?) qui respectent les aspirations profondes des peuples de la Région autant que les résolutions
prises par le Conseil de Sécurité des Nations unies.
Et que l'Union pour la Méditerranée consacre à cette région meurtrie par l'obscurantisme des fanatismes religieux, par la violence quotidienne autant que
par le dramatique déséquilibre des ressources une part prépondérante des projets qu'elle a l'ambition et vocation à développer en Méditerranée.
(*) Cette décision historique par le très haut niveau des avancées octroyées à un Etat qui n'est ni candidat à l'adhésion à l'Union européenne, ni lié à
l'Union européenne par un accord spécifique de partenariat stratégique, a été prise le 8 décembre 2008 (jour de l'Aïd El-Adha pour les musulmans) au titre des conclusions du Conseil
relatives au renforcement des relations bilatérales de l'Union européenne avec ses partenaires méditerranéens (voir le lien correspondant sur ce blog), malgré les réserves appuyées du Parlement
européen et sans être assortie de conditionnalités politiques appropriées aux exigences (objectifs, principes) de la PESC.
Certains observateurs pensent qu'elle aurait été prise en parfaite connaissance de cause de ce que préparait Tsahal vis-à-vis de Gaza après la visite
du Chef d'Etat major de Tsahal à l'Otan (les services de renseignement européens étant particulièrement actifs et efficaces au Proche Orient, cette région occupant une
place essentielle du point de vue des intérêts de sécurité nationale de la plupart des Etats membres de l'UE).
(**) L'Organisation mondiale de la santé a demandé mardi "un arrêt immédiat des hostilités dans la bande de Gaza". Elle a aussi réclamé une
levée du blocus par Israël pour permettre "l'approvisionnement immédiat" en carburant et en matériel médical. "Les hôpitaux, qui manquent déjà de tout, comptent des
centaines de blessés, notamment des femmes, des enfants et des personnes âgées", a souligné l'Organisation mondiale de la santé.
"L'incapacité des hôpitaux à affronter un problème de cette ampleur se traduira, si la situation perdure, par une forte augmentation du
nombre des décès évitables, des suites de complications liées aux blessures", a averti l'OMS. "Ce sont les civils qui paient le prix du blocus prolongé". (Selon une
agence de l'Onu, "au moins 25% de ceux qui ont été tués sont des civils, et il se peut que le bilan soit nettement plus élevé".)
NB : qui qualifie-t-on de "victime civile" dans ce type de statistiques ? L'autorité palestinienne ne disposant d'aucune force militaire, il semble
non seulement que les personnels des forces de sécurité et de police palestiniennes soient répertoriés dans la catégorie des victimes "non civiles" mais également tout homme
offrant une résistance physique ou matérielle à l'assaillant militaire !
Le "chaos" règne dans les hôpitaux de la Bande de Gaza confrontés à un "afflux constant de blessés" depuis le début des raids
israéliens contre le territoire palestinien, selon le CICR. "Les équipes médicales doivent faire face à un afflux constant de blessés depuis le 27 décembre", a relevé lundi
l'organisation humanitaire. "Nous sommes complètement débordés par le nombre de personnes qui arrivent avec des blessures très graves. Je n'ai jamais vu ça", a déclaré au CICR le
chef de l'équipe chirurgicale de l'Hôpital Shifa, à Gaza.