"Between Growth and Stability, The Demise and Reform of the European Union's Stability and Growth Pact" - Recension d'un ouvrage relatif à la croissance et à la stabilité
La rubrique "Bibliothèque européenne" du Bulletin Quotidien Europe
n°9841/812 daté du 17 février 2007 propose une récension d'ouvrages récents consacrés aux questions monétaires, économiques et financières
dont deux d'entre eux font l'objet d'une présentation sur ce blog.
Il s'agit de :
- "Between Growth and Stability,
The Demise and Reform of the European Union's Stability and Growth Pact", ouvrage collectif sous la direction de Leila Simona et de Bernard Casey (Elgar
Publishing : www.e-elgar.com - 2008 - IBSN
978-1-84720-206-2), objet du présent article ;
et de :
- "Les Unions monétaires en droit international", de Moustapha Lô Diatta (Presses Universitaires de France : www.puf.com ; Collection " Publications de l'Institut universitaire de hautes études internationales de Genève" - 2007 - IBSN
2-13-055915-8), objet d'un second article.
"Between Growth and Stability, The Demise and Reform of the European Union's Stability and Growth Pact" (récension de Thomas Bauwen)
Lorsqu'il fut adopté en 1997 à Amsterdam, le Pacte de croissance et de stabilité imposait aux Etats membres des critères de convergence économique à
respecter en vue de l'achèvement de l'Union conomique et monétaire. Ces critères étaient alors considérés comme incontournables, à tel point que le Pacte était présenté comme le "gardien
de la force et de la crédibilité de la future Union économique et monétaire".
Pourtant, en 2003, c'est la douche froide : la France et l'Allemagne n'arrivent plus à suivre et font exploser les limites fixées par le Pacte, menant à
la réforme de 2005, avec des règles assouplies sur plusieurs points.
Selon les auteurs de cet ouvrage, cette réforme peut être assimilée à un véritable échec du Pacte. Pourquoi ? selon eux, parce que - et c'est ce qu'ils
s'attachent à démontrer - "les évènements de novembre 2003 et les changements apportés au Pacte de croissance et de stabilité en mars 2005 configurent un instrument politique et économique
différent de celui qui avait été approuvé originellement". Exit donc, le "gardien" sur lequel était censé reposer toute l'architecture économique et monétaire de l'Union.
Ce constat entraine automatiquement une série de questions primordiales. Quels ont été les effets de la "disparition" du Pacte sur l'UEM ? Quel a été le
rôle des Etats membres dans la crise ? Quelle fut la réaction des marchés financiers ? La chute du Pacte est-elle un signal de crise de l'intégration européenne dans son ensemble ? Le Pacte
réformé apporte-t-il des solutions adaptées aux problèmes de 2003 ?
Tout au long des six contributions qui le composent, ce bel ouvrage, écrit sous la direction de deux grands économistes de Londres, tente d'apporter des
réponses à ces questions en se concentrant sur la question de la crédibilité. Combinant les perspectives économique et politique, il cherche plus exactement à "trouver une solution aux
dilemmes posés par la coordination de la politique budgétaire dans le contexte d'une zone monétaire commune" et à analyser la crédibilité de ce type d'accords économiques internationaux.
Pour ce faire, les théories économiques et politiques existantes sont d'abord recensées, expliquées et approfondies afin de réconcilier ensuite chacun des deux champs d'analyse au sein d'un
modèle économique intégré.
Pour sa part, le deuxième chapitre est consacré à la dépendance du système monétaire européen à "l'ordre financier néolibéral transnational qui
déplace les contradictions socio-économiques des Etats-Unis vers d'autres parties du monde, incluant l'Europe".
Constituant sans doute l'un des plus intéressants de cet ouvrage, le troisième chapitre répond à la question de la survie de la monnaie unique après l'estompement de la règle budgétaire censée
assurer sa pérennité. Comment, en effet, expliquer ce constat paradoxal ? Les auteurs y parviennent à l'aide d'une version "incorporée" de la théorie intergouvernementaliste de Moravsik : selon
eux, le maintien de l'UEM s'explique assez simplement par la volonté des groupes socio-économiques dirigenats des Etats membres les plus puissants de continuer à croire en la crédibilité des
régimes des taux de change.
Une autre question posée par les auteurs, non moins intéressante, est celle de la crédibilité de la Banque centrale européenne d'un point de vue
allemand. Comment expliquer, en effet, que la pays qui a inspiré les règles de la Banque de Francfort ait échoué dans sa tentative de suivre ces mêmes règles ? L'auteur de ce chapitre
remet en question, preuves à l'appui, les explications classiques du déséquilibre causé par la réunification allemande et des problèmes posés par une règle budgétaire imposée "par le haut".
Pour terminer, les deux derniers chapitres sont consacrés au Pacte réformé. A partir d'une analyse des futurs défis à relever par celui-ci et de ses
capacités à y parvenir en fonction des critères de crédibilité, de flexibilité et de légitimité, les auteurs affirment que, même avec des ambitions revues à la baisse, le nouveau Pacte est loin
d'être inutile. Néanmoins, son efficacité dépendra largement "de la capacité des Etats membres de la zone Euro à développer des cadres budgétaires nationaux complémentaires et à promouvoir
des réfromes structurelles", en attendant la nécessaire mais si difficile à réaliser Union politique.
Très complet et basé sur une analyse économique et politique pointue, "Between Growth and Stability, The Demise and
Reform of the European Union's Stability and Growth Pact" est sans aucun doute un ouvrage indispensable tant pour les étudiants que pour les économistes chevronnés, à l'heure où la
crise économique et financière que traverse l'Union européenne amène plus que jamais à poser la question d'une véritable gouvernance économique européenne.