Jean-Yves Le Drian décidé à secouer l'Europe de la Défense (Entretien avec Ouest France)
Rigueur budgétaire oblige, le nouveau ministre de la Défense va rencontrer ses homologues finlandais, danois, italien, allemand et britannique pour « faire bouger » l’Europe.
Vous entamez aujourd’hui une tournée européenne. Il y a urgence ?
La donne stratégique a évolué. Il y a le Printemps arabe dont on peut se demander s’il n’est pas parfois un automne. Il y a le
terrorisme, avec tous les risques qu’on identifie au Sahel. Il faut aussi prendre en compte l’évolution de la politique américaine et l’affirmation que l’effort principal de Washington portera
désormais sur l’axe Asie-Pacifique. Il y a, enfin, une crise majeure économique qui n’était pas là en 2008, lors de la préparation de la loi de programmation militaire. Il nous faut donc
redéfinir les engagements que prend la France pour sa défense. Seule ou avec d’autres ?
Avec d’autres ? Avec les Européens donc…
La question de ces engagements en matière de défense ne se pose pas que pour la France, mais pour toute l’Europe. Or, à Chicago,
lors du sommet de l’Otan, ce qui m’a frappé, c’est que les préconisations finales ont bien mis l’accent sur l’Europe de la Défense et que les Américains sont devenus presque plus enthousiastes
que nous sur cette question. Désormais, c’est à la France de bouger parce que nous sommes au croisement de deux types de relations. L’une, particulière, avec la Grande-Bretagne, avec qui nous
sommes de tous les engagements. L’autre qui s’est nouée avec les Allemands et avec les Polonais dans le cadre du triangle de Weimar et à laquelle peuvent s’associer Italiens et Espagnols. Puisque
nous sommes au centre, à nous de prendre des initiatives !
Comment comptez-vous procéder ?
Chaque pays se rend bien compte que, tout seul, il ne peut plus tout faire, qu’il ne peut plus se défendre. Il faut donc des
partenariats. Déjà avec les Britanniques, il y a eu des amorces, comme la coopération dans le domaine nucléaire qui s’est engagée et sera poursuivie. Il existe des domaines où des possibilités
concrètes existent : les forces d’intervention, les drones, l’aviation de transport et de ravitaillement. Dressons la liste de ce que l’on peut faire rapidement et faisons-le de façon
pragmatique, dans un contexte de crise. C’est ce que je vais préconiser à mes homologues. C’est incontournable. Et c’est avec cette nouvelle donne et ces grandes mutations à l’esprit que nous
allons préparer un nouveau Livre blanc, qui est de la responsabilité du chef de l’État, et une nouvelle loi de programmation militaire.
Voir également sur ce blog :
* Combler le vide stratégique ! par Christian Harbulot (Infoguerre)
* La preuve par les faits serait plus convaincante que la répétition de messages ambitieux !