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Publié par ERASME

« Il faudra se soumettre ou se démettre »

 

Discours de Léon Gambetta prononcé à Lille : 15 août 1877

 

Ayant obtenu du Sénat la dissolution de la Chambre, le gouvernement entreprend une lutte acharnée contre les républicains. Mac-Mahon menace, dans un texte adressé aux troupes de la garnison de Paris le 1er juillet 1877 : « Soldats... vous comprenez vos devoirs, vous sentez que le pays vous a remis la garde de ses plus chers intérêts... ! »

À Lille, le 15 août, Gambetta lui répond. Dans un discours qui galvanise l'auditoire, l'orateur marque la détermination des républicains à gagner les élections et leur confiance dans l'avenir. La République l'emportera dans les urnes et rien ne pourra ensuite l'arrêter. La péroraison finale qui vise directement le président de la Répu­blique est sans équivoque sur les lendemains des élections.

Le discours de Lille eut un immense retentissement. Le gouvernement réagit le 25 août en engageant des poursuites contre Gambetta et les journaux qui avaient publié le texte.

Le 19 septembre Mac-Mahon lance un manifeste au pays «... je resterai pour défendre, avec l'appui du Sénat, les intérêts conservateurs... ».

Les républicains obtiennent 327 députés contre 208 monarchistes. Un gouvernement républicain est constitué. En 1879, à la suite d'élections partielles, les républicains obtiennent la majorité au Sénat. Le 30 janvier 1879, Mac-Mahon démissionne. Il est remplacé par Jules Grévy.

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La République sortira triomphante de cette dernière épreuve, et le plus clair bénéfice du 16 mai sera, pour l'histoire, d'avoir abrégé de trois ans, de dix ans, la période d'incertitude et de tâtonnements à laquelle nous condamnaient les dernières combinaisons de l'Assemblée nationale élue dans un jour de malheur.

Messieurs, telle est la situation. Et j'ose dire que les espérances du Parti républicain sont sûres ; j'ose dire que votre fermeté, votre union, que votre activité sont les garants de ce triomphe. Pourquoi ne le dirais-je pas, au milieu de ces admirables populations du département du Nord, qui, à elles seules, payent le huitième des contributions de la France, dans ce département qui tient une des plus grandes places dans notre industrie nationale, aussi bien au point de vue mécanique qu'agricole ? N'est-il pas vrai que, dans ce pays, vous avez commencé aussi à faire justice des factions qui s'opposaient à l'établissement de la République et que vous n'attendez que l'heure du scrutin pour que tous vos élus forment une députation unanime ?

Vous le pouvez si vous le voulez, et vous savez bien ce qui vous manque : ce ne sont pas les populations disposées à voter pour des candidats républicains ; ce sont des candidats qui consentent à sortir définitivement d'une résistance dictée par des intérêts privés et comprennent qu'il s'agit aujourd'hui d'un service public et d'élections d'où dépendent les destinées de la France. Il faut que ces hommes fassent violence à leurs intérêts domestiques pour aborder la plate-forme électorale.

À ce point de vue, des adhésions significatives ont déjà été obtenues et vous avez su trouver des candidats qui vous mèneront à la victoire. Je devais plus particulièrement le dire ici, dans ce département qui, parmi les autres, tient la tête dans les questions d'affaires et de politique. Je devais le dire ici pour vous mettre en garde contre certains bruits qui ont été répandus et dont on alimente la basse presse, à savoir que si le suffrage universel dans sa souveraineté, je ne dirai pas dans la liberté de ses votes, puisqu'on fera tout pour restreindre cette liberté, mais dans sa volonté plénière, renomme une majorité républicaine, on n'en tiendra aucun compte. Ah! tenez, Messieurs, on a beau dire ces choses ou plutôt les donner à entendre, avec l'espoir de ranimer par là le courage défaillant de ses auxiliaires et de remporter ainsi la victoire : ce sont là de ces choses qu'on ne dit que lorsqu'on va à la bataille; mais, quand on en revient et que le destin a prononcé, c'est différent ! Que dis-je, le destin ? Quand la seule autorité devant laquelle il faut que tous s'in­clinent aura prononcé, ne croyez pas que personne soit de taille à lui tenir tête. Ne croyez pas que quand ces millions de Français, paysans, ouvriers, bourgeois, électeurs de la libre terre française, auront fait leur choix, et précisément dans les termes où la question est posée ; ne croyez pas que quand ils auront indiqué leur préférence et fait connaître leur volonté, ne croyez pas que lorsque tant de millions de Français auront parlé, il y ait personne, à quelque degré de l'échelle politique ou administrative qu'il soit placé, qui puisse résister.

Quand la France aura fait entendre sa voix souveraine, croyez-le bien, Messieurs, il faudra se soumettre ou se démettre.

Source : http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/suffrage_universel/suffrage_gambetta.asp

 

 

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