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Publié par Jean Poche

Il peut paraître prématuré de se soucier de la prochaine crise financière. Pourtant, dans la morosité ambiante, on voit la finance se jeter sur les actifs des "économies émergentes", où la croissance est plus forte et les retours sur investissement plus importants et plus réguliers. Les autorités des marchés et les responsables politiques de ces pays feraient bien d'y prendre garde.

L'Institue of International Finance, un lobby des banques, estime que 825 milliards de dollars vont affluer vers les pays en développement cette année, soit une hausse de 42 % par rapport à 2009. Les investissements faits à crédits par les économies émergentes devraient quant à eux tripler, pour atteindre 272 milliards de dollars.

Si ces nations profitent souvent des placements étrangers, les entrées massives de capitaux compliquent la gestion macroéconomique. Elles font monter le cours de la devise, renforçant les importations au détriment des exportations et encouragent l'expansion du crédit, l'inflation, les bulles spéculatives et un amoncellement de débiteurs insolvables. Et cet argent change de destination aux premières difficultés, précipitant les pays dans le marasme.

Ce phénomène a été à l'origine d'une série de crises : le Mexique en 1994, l'Asie en 1997, la Russie en 1998, le Brésil en 1997 et l'Argentine en 2002. La bulle immobilière qui a fait tant de mal aux Etats-Unis en 2008 était de même nature : des investissements irrationnels et un fuite soudaine des capitaux.

S'il devait se produire, l'écroulement des marchés obligataires émergents affaiblirait le bilan fragile des banques américaines. Pour autant, l'heure n'est pas à la panique.

Les pays en développement sont en relative bonne santé et les taux d'intérêt devraient rester faibles dans les pays riches pendant encore quelques années. Toutefois, le système financier demeure vulnérable et un choc - comme un défaut de paiement de l'Irlande ou de la Grèce - pourrait provoquer une fuite éclair des investisseurs des marchés émergents.

Les dirigeants des pays riches ne peuvent pas faire grand-chose pour stopper ces flux. Les gouvernements du monde en développement ont donc tout intérêt à se préparer au moment où les maîtres de l'argent changeront d'avis. Ce qui signifie qu'ils doivent s'astreindre à une politique budgétaire rigoureuse.

Ils feraient bien aussi de surveiller de près leurs propres banques et peut-être d'envisager de ralentir les flux de capitaux en les contrôlant. C'est ce que le Chili a très bien su faire dans les années 1990. Le FMI lui-même, depuis longtemps ennemi de tout obstacle à la circulation de l'argent, admet que ce contrôle doit faire partie de l'arsenal des gouvernements.

 

Source : éditorial du Times publié par Le Figaro

 

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