Covid 19 L'épidémie est inexorable - pas la catastrophe sanitaire (G-P Goldstein) - La Vigie
"Trois nouvelles conclusions géopolitiques & économiques peuvent être tirées à la date d’aujourd’hui [...] L’Asie développée démontre qu’elle surclasse technologiquement l’Europe dans la gestion de crise – et peut-être, sur certains angles, les États-Unis. Aucuns des moyens technologiques (du dépistage de masse, aux volets des technologies numériques) semblent à date présents en terme d’échelle et de qualité dans les réponses à la crise développées en Europe. Même le dépistage de masse fait défaut aux États-Unis : au 10 Mars, les États-Unis avaient réalisés moins de 5000 tests depuis le 19 janvier. C’est à peine mieux que l’Inde qui en a réalisé un peu plus de 4000. Un autre exemple de ce retournement : la Chine vend à l’Italie le 10 Mars 1000 systèmes d’assurance respiratoires, 2 millions de masques et fait don ( !) de 100 000 appareils respiratoires, 20 000 combinaisons de protection et 50 000 kits de test. La Corée vend aussi ces tests en kit. L’Europe semble déclassée [...] Le keynésianisme va revenir triomphant : le risque d’un effondrement boursier continu tant que le pic de la crise sanitaire n’est pas visible ni en Europe ni aux États-Unis risque de créer une crise de liquidités. Au Japon, en Chine mais aussi en Europe et même peut-être aux États-Unis, on se prépare à des mesures de déficit budgétaires pour renflouer directement l’économie alors que les banques centrales, confrontés à des taux trop bas ou même négatifs, ont peu de marges de manœuvres. Mais au niveau thématique, il est impensable de ne pas croire que « Medicare for all » va devenir un mantra inexorable si l’épidémie fait des ravages aux États-Unis. Et de manière plus générale, l’épidémie risque de mettre à nu un système social ou l’absence de filet de sécurité a fini par détruire la résilience de la société face à un choc externe brutal [...] La compréhension d’un monde plus connecté et plus exponentiel : C’est l’ultime leçon de la crise du COVID-19. D’une part les pays européens semblent l’avoir traité comme la crise du SARS en 2002-2003. Or non seulement le pathogène est bien plus contagieux ; mais en outre, la Chine est désormais au cœur de la chaîne de production mondialisée. Wuhan, lieu de production automobile pour Peugeot, possédait par exemple une liaison aérienne directe avec Paris avant la crise. Et 2,4 millions de touristes chinois avaient visité la France en 2019. On ose espérer qu’aucun dirigeant européen n’a pu penser que la crise pourrait être circonscrite à l’Asie [...] Mais comment a-t-elle été préparée en Europe au cours des 6 semaines depuis la mi-janvier, quand elle se déclare à Wuhan ; et le début mars ? Des exercices de simulation de crise ont-ils été réalisés ? Si oui, quelles conclusions et préparations en ont découlé ? On en vient à une dernière question, fondamentale. Celle de l’apparence, espérons-le trompeuse, que les dirigeants européens agissent en fonction de l’évolution de la situation au jour le jour et de manière proportionnée à celle-ci – sans voir qu’il y a un modèle d’évolution « exponentielle » de l’épidémie jusqu’au pic et que l’on ne peut pas agir de manière linéaire face à un phénomène qui double tous les 6 jours. On retrouve là, curieusement, le mode de pensée des grands dirigeants d’entreprises traditionnelles face à la disruption numérique, dépassé par des petits concurrents qui double de taille à intervalle réguliers – jusqu’à submerger « par surprise » la vieille entreprise. Cela se retrouve dans la gestion de crise : on applique le plan – mais en période de crise, le plan n’est qu’un point de départ. Sur cette base, les dirigeants doivent mobiliser imagination et audace face à une situation dont la gravité peut justement augmenter de plusieurs degrés de magnitude très rapidement. On se prend à rêver à un Churchill qui avait précisément ces capacités d’audace et d’imagination."
/https%3A%2F%2Fmedia2.ledevoir.com%2Fimages_galerie%2Fnwd_789122_623036%2Fimage.jpg%23width%3D1656%26height%3D1060)
Covid 19 L'épidémie est inexorable - pas la catastrophe sanitaire (G-P Goldstein) - La Vigie
Faisant suite à un précédent article paru dans ces colonnes (voir ici en libre lecture), Guy-Philippe Goldstein nous offre un nouveau point de situation stratégique sur le COVID 19. Merci à lu...