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Publié par ERASME

« L’histoire des peuples qui ont une histoire est, dit-on, l’histoire de la lutte des classes. L’histoire des peuples sans histoire, c’est, dira-t-on avec autant de vérité au moins, l’histoire de leur lutte contre l’État. »

« Dans la société primitive, société par essence égalitaire, les hommes sont maîtres de leur activité, maîtres de la circulation des produits de cette activité : ils n’agissent que pour eux-mêmes, quand bien même la loi d’échange des biens médiatise le rapport direct de l’homme à son produit. Tout est bouleversé, par conséquent, lorsque l’activité de production est détournée de son but initial, lorsque, au lieu de produire seulement pour lui-même, l’homme primitif produit aussi pour les autres, sans échange et sans réciprocité. »

Pierre Clastres — La Société contre l'État

Pierre Clastres était anthropologue et ethnologue. Il est notamment connu pour ses travaux d'anthropologie politique, ses convictions et son engagement libertaires. Sa principale thèse est que les sociétés primitives ne sont pas des sociétés qui n'auraient pas encore découvert le pouvoir et l'État, mais au contraire des sociétés construites pour éviter que l'État n'apparaisse. Son œuvre la plus connue est La Société contre l'État.

Dans son œuvre la plus connue, La Société contre l'État, Clastres critique à la fois les conceptions évolutionnistes, qui voudraient que l'État organisé fût la finalité de toute société, et la vulgate rousseauiste sur l'innocence naturelle de l'homme. Ce faisant, il expulse paradoxalement l'État de la place centrale qu'il occupait alors dans l'anthropologie politique pour recentrer la problématique de son apparition autour de la notion de pouvoir coercitif. La connaissance de cette notion de pouvoir serait innée dans toute société, ce qui expliquerait cette tendance naturelle de l'homme à préserver son autonomie vis-à-vis de celui-ci. Les sociétés premières sont donc perçues comme étant des structures faites d'un réseau de normes complexes qui empêchent activement l'expansion d'un pouvoir, compris comme despotique et autoritaire. À l'opposé, l'État est cette constellation législative émanant d'un pouvoir hiérarchique qu'elle légitime, dans les sociétés qui ont échoué à maintenir en place des mécanismes naturels qui l'empêchent de prendre cette forme coercitive.

Clastres oppose ainsi les grandes civilisations andines aux petites unités politiques formées par les chefferies amazoniennes, dont l'ensemble du corps social se met continuellement en branle pour empêcher le chef de transformer son prestige en pouvoir contraignant.

On retiendra sa thèse principale : les sociétés premières ne sont pas des sociétés qui n'auraient pas encore découvert le pouvoir et l'État, mais au contraire des sociétés organisées pour éviter que l'État n'apparaisse. Dans Archéologie de la violence, Clastres s'oppose ainsi aux interprétations structuralistes et marxistes de la guerre dans les sociétés amazoniennes. Selon lui, la guerre entre tribus est une façon de repousser la fusion politique, et donc d'empêcher la menace que constitue le principe de la délégation du pouvoir, qui mène aux dérives intrinsèquement liées à la trop grande taille d'une société.

Les sociétés dites « primitives » (ou segmentaires) refusent la différenciation économique et politique en interdisant le surplus matériel et l'inégalité sociale. Clastres refuse l'appellation de « sociétés sans État », car il juge que cela constitue un parti pris selon lequel l’État serait indispensable, son absence un manque pour une société, alors que ses convictions quelque peu anarchistes le conduisent à juger favorablement les sociétés dans lesquelles il n'existe pas d’État, pas d'exploitation d'hommes par d'autres hommes. Il est à signaler toutefois que ces tribus disposent chacune d'un chef. Mais ce chef ne possède qu'un rôle de diplomate ou, à l'occasion, de chef de guerre mais n'exerce pas en temps de paix de pouvoir politique. Le chef joue aussi parfois le rôle de médiateur en cas de litige entre des membres de la tribu. Si le chef veut exercer un véritable pouvoir sur sa tribu, s'il a trop d'ambition ou une aspiration à commander, à conduire une guerre, il peut se faire évincer de son poste honorifique, voire être éliminé. La société primitive serait ainsi une « société par essence égalitaire », semble approuver Clastres, qui, dans le chapitre 10, n'offre d'autre possibilité à « une terrible cruauté » des rites initiatiques amérindiens qu'« une plus terrible cruauté », celle de l’État confondu avec l’État totalitaire soviétique. En outre, l'anthropologue décrit sans les juger les inégalités entre hommes et femmes. Enfin, ces sociétés segmentaires connaissent une économie de subsistance, mais comprise comme une forme d'abondance selon l'analyse de Marshall Sahlins auquel fait référence l'auteur, c'est-à-dire que les hommes ne produisent que ce qui leur est nécessaire pour vivre et sont des « sociétés de refus du travail » selon Jacques Lizot. Ils travaillent donc peu, beaucoup moins que dans les sociétés connaissant l'économie de marché. Clastres affirme qu'ils travaillent moins de quatre heures par jour. "

(Source : Wikipedia)

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