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Regards citoyens

Ce blog est destiné à stimuler l'intérêt du lecteur pour des questions de société auxquelles tout citoyen doit être en mesure d'apporter des réponses, individuelles ou collectives, en conscience et en responsabilité !

A propos des origines du "wokisme" (Le blog de Christian Dubuis-Santini)

Il y a une semaine, j’ai relayé ici une conférence de Jean-François Braunstein sur "la religion woke" telle qu’il la nomme lui-même.

Or, Rudy Goubet-Bodart, psychanalyste à Singapour, me fait remarquer que Braunstein, qui a le mérite de faire le point sur la prolifération de l’idéologie woke aujourd’hui dans les universités et au-delà jusqu’aux écoles maternelles, reste cependant lui-même en deçà des enjeux en assimilant le wokisme à la religion, ne voulant peut-être pas voir en l’occurrence la responsabilité des philosophes Deleuze, Foucault et Derrida dans cette formidable dérive [si Lacan les appelait les universitaires, il ne s'y trompait pas: ils ont toujours été le soutien du discours du Maître (capitaliste)].
Rudy nous rappelle à l’occasion que ce qui s'appelle aujourd'hui wokisme est l'extension hors université américaine des "cultural studies" qui sont elle-mêmes issues de la réception tout à fait particulière aux États-Unis de l'effervescence intellectuelle française de l'après-guerre, abusivement simplifiée en "French Theory" (la somme des lectures approximatives des textes de Deleuze, Foucault, Derrida …et Lacan!)
Déjà bien avant le "wokisme" les "cultural studies" avaient été critiquées, moquées et même surnommées ‘"cult stud" (cult signifiant secte en anglais…) par les penseurs américains qui se confrontaient encore au marxisme…
Les Cult Stud manifestent la pleine acceptation du capitalisme et de son "self-made man" (qui est aujourd'hui poussé à son paroxysme avec le transgenrisme…)
Pour les Cult Stud les antagonismes sont avant tout culturels au sein même de l'indépassable paradigme capitaliste. Autant dire qu’à la lutte des classes s’est substituée la lutte des races et celle des sexes au sein d'une société capitaliste décrite et décriée comme présentant un racisme et un sexisme systémique. Le capitalisme lui-même est donc décrit comme une matrice culturelle plutôt que comme un procès de production et d'exploitation économique et sociale (c'est pour ça que l'identité de l'homme blanc hétérosexuel centralise toutes les critiques, cela se trouve déjà sous la plume de Deleuze…). Le capitalisme est donc critiqué mais jamais réellement remis en cause puisque ce que veulent les wokistes c'est simplement accéder aux places de pouvoirs qui existent déjà — et ils y arrivent!
Tout cela est intimement lié à "l'histoire" des États-Unis, et à ce titre des penseurs comme Deleuze (qui définit le désir comme constructiviste…), Foucault (qui affirme la disparition de l'Homme…) et Derrida (qui fournit à Deleuze la notion de déconstruction empruntée à Heidegger…) ont bel et bien apporté leur pierre à l'édifice (pour peu que l’on nous passe l’expression), car si tout peut se construire tout peut se déconstruire …et surtout l'homme blanc! C'est là l'ironie du sort car Derrida et Deleuze sont eux-mêmes critiqués par les wokistes car ils étaient des hommes blancs hétérosexuels, Foucault en tant qu’homosexuel restant intouchable…
La French Theory est donc une sorte de cheval de Troie intellectuel réalisé par les intellectuels made in USA pour pouvoir prétendre s'appuyer sur une pseudo-extériorité afin de légitimer leur tentative d'effacement de la lutte des classes de Marx…
Bref, comme nous l’avons déjà vu, toute la merde discursive continue de nous arriver par flots des États-Unis, sans que nous n’y opposions une grande résistance, ce que Céline avait déjà remarqué dans son Voyage au bout de la nuit dès 1932: «On n’échappe pas au commerce américain.» "
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