La journée franco-allemande fête aujourd’hui son vingtième anniversaire, et le traité d’Aix-la-Chapelle son cinquième. Ce sont deux bonnes occasions de prendre un moment pour considérer les grandes lignes de l’apport franco-allemand à l’intégration européenne. En ce début d’année 2024, c’est avec une pensée particulière pour Jacques Delors que nous l’abordons. Lui-même avait en effet un lien profond avec cette réconciliation, après les deux guerres mondiales que sa famille avait traversées comme tant d’autres avec son lot de douleurs et de souffrances.
La réconciliation franco-allemande était pour lui quelque chose de constitutif et d’essentiel, une opportunité de l’histoire qui a été institutionnalisée et qui a posé le fondement d’un projet bien plus large et ambitieux, celui de la construction européenne. De fait, le passage d’une réconciliation bilatérale à un moteur politique capable d’impulser un progrès européen lui apparaissait naturel, pour ne pas dire d’organique.
Il sut saisir la perche que tendait l’histoire après-guerre. Il n’a pas hésité lorsque des circonstances favorables ont commencé à se dessiner à poursuivre cela au cours des années 80. Par un travail de long terme, une méthode définie et une vision claire, il a permis de transformer l’Europe et de construire l’Union européenne telle que nous la connaissons.
L’héritage franco-allemand de ce succès reste non seulement pertinent, mais essentiel pour les nombreux chantiers européens qu’il convient de faire avancer. Cet esprit, Wolfgang Schäuble le portait également, lui qui nous a quittés un jour avant Jacques Delors et à qui il sera rendu hommage au Bundestag aujourd’hui. Le profond ancrage de cette amitié est souligné d’ailleurs par les discours du Président de la République Emmanuel Macron, ainsi que par la présence de membres du gouvernement français lors de cet hommage. Cette chaleureuse normalité franco-allemande est aussi le fruit des efforts répétés de Wolfgang Schäuble dans ce sens, lui qui était co-président de l’Assemblée parlementaire franco-allemande lors de sa création en 2019.
Paris et Berlin doivent renouveler en permanence leurs efforts pour maintenir et développer ce lien si particulier. Ceci alors que nous avons plus besoin que jamais d’un dialogue ouvert et inclusif à l’égard de tous les pays-membres et des institutions européennes, d’un volontarisme et d’une certaine pugnacité dans la poursuite d’une intégration européenne plus intense. Les deux institutions, l’Institut Jacques Delors et le Jacques Delors Centre, continueront à œuvrer en ce sens.