Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Regards citoyens

Ce blog est destiné à stimuler l'intérêt du lecteur pour des questions de société auxquelles tout citoyen doit être en mesure d'apporter des réponses, individuelles ou collectives, en conscience et en responsabilité !

De l'acculturation aux processus d'acculturation, de l'anthropologie à l'histoire Petite histoire d'un terme connoté, par Cécilia Courbot (In Hypothèses 2000/1 (3), pages 121 à 129)

[ ... ] L’évolution de la définition du terme d’acculturation paraît étroitement liée à celle de l’anthropologie, et notamment à son approche du phénomène de la colonisation européenne.
Dans la discipline anthropologique, la notion d’acculturation se généralise dans les années 1950-1960, dans le cadre du développement de l’école culturaliste, fondée sur l’existence d’un ensemble de traits typiques constituant le caractère ethnique qui formerait la personnalité de base d’un individu, au cours de son enfance. Des anthropologues américains, tels que Meyers Herskovits ont ainsi mené des études sur les indiens, les noirs américains.
6Dans un premier temps, la notion d’acculturation était conçue comme un emprunt culturel à sens unique, comme l’emprunt d’une société « archaïque » à une société « civilisée ». Mais, dès 1938, Meyers Herskowits proposa une définition, devenue classique : « l’acculturation comprend les phénomènes qui résultent du contact continu et direct des groupes d’individus ayant différentes cultures, ainsi que les changements dans les cultures originales des deux groupes ou de l’un d’entre eux ».
Une lecture plus attentive de ses travaux révèle cependant une avancée moins grande que ne le laisserait supposer cette nouvelle définition, avec l’utilisation de la notion « d’africanité » qui suppose l’existence d’une culture africaine globale. La notion d’interaction entre les cultures en présence apparaît donc timidement dans le domaine anthropologique, dès cette époque.
Assez vite, le terme d’acculturation apparaît recouvrir une notion trop générale. En tentant de préciser ce concept, différentes tentatives de redéfinition n’aboutissent qu’à la création de nouveaux vocabulaires. On assiste alors à une décomposition de la notion en une multitude de sous-concepts : endoculturation, transculturation, déculturation, syncrétisme etc. En 1974, Nathan Wachtel écrivait ainsi que l’acculturation était une notion trop générale, qui ne permettait pas d’aborder la multiplicité des processus de changement que l’anthropologie cherchait à étudier L’acculturation est alors considérée comme un processus, dont on peut considérer différentes phases. Il s’agit désormais d’étudier les phénomènes de déperdition de culture ou « déculturation » ainsi que de transformation ou « transculturation », corollaires du processus d’acculturation. En outre, à partir d’une définition mettant l’accent sur la domination possible d’une culture sur l’autre, les nouvelles études, elles, incluent les processus affectifs de regret à l’égard de la culture antérieure. Elles analysent ainsi les essais de retour à une culture ressentie comme authentique qui interviennent en fin de processus acculturatifs.
L’acculturation devient ainsi, progressivement, une « notion désignant les phénomènes complexes qui résultent des contacts directs et prolongés entre deux cultures différentes, entraînant la modification ou la transformation de l’un ou des types culturels en présence ». En 1981, le travail de Sélim Abou offre un outil d’analyse en définissant les situations et les expériences d’acculturation : typologie des situations d’acculturation, définition des cultures en contact, modes d’acculturation, processus d’acculturation. L’auteur pense, en effet, qu’une « étude pluridisciplinaire ne permet pas de saisir le phénomène dans sa réalité immédiate mais offre une grille d’analyse qui dispose à la comprendre ». L’originalité de cette étude est qu’elle ne se limite pas aux situations coloniales mais qu’elle analyse les phénomènes d’acculturation provoqués par l’immigration. Elle prend ainsi en compte de nouveaux types de contact et donc de nouvelles situations d’acculturation.
Le terme d’acculturation recouvre ainsi l’ensemble des processus possibles mais il demeure, le plus couramment, utilisé dans sa définition restrictive de contact culturel entre deux sociétés de puissances inégales. En outre, les études anthropologiques conservent leur tendance à déchiffrer le changement culturel du point de vue d’un seul des deux univers en présence. [...]

Voir l'article : De l'acculturation aux processus d'acculturation, de l'anthropologie à l'histoire - Petite histoire d'un terme connoté

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article