Des tabous dans nos pratiques ? par Élisabeth Zucman (In Contraste 2007/2 (N° 27), pages 67 à 74)
Dans Totem et tabou (Freud, 1912), Sigmund Freud définit le tabou comme un interdit sacré frappant une personne ou un objet considéré comme dangereux ou comme impur par le groupe ; les personnes taboues dans les sociétés traditionnelles étaient soit des puissants – chefs, rois... – soit des personnes vulnérables : femmes, enfants, endeuillés... Le tabou protège la communauté du danger ou de l’impureté qu’il représente, en établissant une séparation rigoureuse : exclusion, interdiction de toucher la personne taboue et les objets qui lui appartiennent, et surtout interdiction d’en parler et même de le nommer. Le tabou est donc un objet sacré redoutable, doué d’un pouvoir séparateur absolu, et par là même facteur d’exclusion. Mais il est aussi garant de l’ordre social, car il est hautement protecteur des membres du groupe qui le respectent en obéissant à l’interdit. Le tabou est garant de l’identité collective, de sa culture et de ses valeurs.
Il est donc intéressant de questionner l’existence de tabous dans l’action médico-sociale précoce, en tant que forces protectrices de ses valeurs propres : le respect de l’enfant accueilli et de sa famille, l’engagement personnel des professionnels dans la relation d’aide, l’importance accordée au savoir-être, à la parole, à l’écoute, à la valorisation du travail en équipe… Il semble qu’on puisse reconnaître dans la culture de l’action médico-sociale précoce deux sortes de tabous : les uns lui appartiennent en propre ; les autres sont l’écho des tabous de la société globale.
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