Ce blog est destiné à stimuler l'intérêt du lecteur pour des questions de société auxquelles tout citoyen doit être en mesure d'apporter des réponses, individuelles ou collectives, en conscience et en responsabilité !
25 Octobre 2024
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Réconciliation |
Je suis venue m’exprimer ce mercredi 23 octobre au Womens’s Forum dont le thème cette année est « Réconciliation ».
Réconciliation… voilà bien un mot suspect dans un pays qui préfère, dit-on, la Révolution à la réforme et la confrontation au compromis. Et pourtant, je crois qu'en ces temps troublés, nous avons bien besoin de réconciliation en France.
Car réconcilier, ce n'est pas taire les différences ou nier les divergences. Réconcilier, c’est construire des ponts là où certains s’entêtent à ériger des murs. C'est trouver « l’unité dans la diversité », pour reprendre la devise européenne.
Comment croire à la réconciliation, quand l’Assemblée est polarisée en trois grands blocs que l’on dit « irréconciliables » ? Quand les sociologues décrivent une France « archipelisée » ?
Je suis une optimiste assumée et j’affirme que la réconciliation est non seulement nécessaire, mais encore possible. Cette Assemblée, que l’on dit irréconciliable, va vous surprendre. Elle est en ce moment au travail et nos institutions vont en étonner plus d’un par leur stabilité et leur efficacité. Les groupes politiques ne sont pas d’accord entre eux ? C'est vrai. Mais ne confondons pas désaccord et dysfonctionnement : à l'Assemblée, les divergences font partie du débat et du jeu démocratique.
Mais à l'Assemblée nationale aussi, l’unité est possible. Et même l’unanimité, comme lorsque ce mois-ci, deux textes ont été approuvés par l’ensemble des députés pour relancer nos travaux de contrôle sur la protection de l’enfance et les violences sexuelles dans le cinéma. Deux votes qui succèdent déjà 39 textes votés à l’unanimités lors de la précédente mandature dont 11 issus d’initiatives transpartisanes.
Ces initiatives, je les ai voulues, crées, encouragées. Car c'est mon rôle, comme présidente de l'Assemblée nationale, de faire émerger du consensus là où il y avait du dissensus ; de négocier inlassablement avec les groupes politiques, pour leur démontrer que ce qui nous rassemble est plus fort que ce qui nous divise. C’est là toute la richesse de la démocratie parlementaire. Nous l’avions oublié, mais nos démocraties peuvent bien fonctionner sans majorité absolue – comme entre 1958 et 1962, comme chez nos voisins européens.
Dans une démocratie, il est sain que les résultats des votes évoluent en fonction du débat. « Débattre » : voilà bien un verbe avec lequel nous devrions nous réconcilier. Car « débattre », cela signifie « cesser de se battre ». C’est apprendre à s’écouter plutôt qu'à s’affronter. C’est accepter l’échange et s’astreindre au dialogue. Et qu'est-ce que le Parlement, sinon le « lieu où l’on parle » ? L’espace où se forgent des compromis pour l’intérêt général - et en particulier pour la cause des femmes. |
Car parmi ces textes transpartisans que j’ai évoqués, nombre d’entre eux portaient sur les droits des femmes. Mais il nous reste tant de chemin à parcourir pour que l’égalité ne soit pas seulement de façade, mais une réalité de tous les jours.
Agissons ensemble pour que les femmes soient payées autant que les hommes, à postes et qualifications égaux. Agissons ensemble pour continuer à changer les mentalités pour que les femmes n’aient plus à arbitrer entre carrière et parentalité en incitant davantage les hommes à prendre un congé parental, et de mieux partager les tâches domestiques dans le couple.
Agissons ensemble pour que les femmes soient nommées aux postes à responsabilité qu’elle mérite, au sein des entreprises, mais aussi à la tête de nos institutions nationales et internationales. Car l’enjeu de l’égalité entre les femmes et les hommes dépassent largement nos frontières, là où certains pays, parfois même de grandes démocraties, n’hésitent plus à revenir sur leurs droits fondamentaux.
En ces temps troublés, je veux donc passer un message simple : ayez confiance. Ne doutons jamais de la capacité des Français à se réconcilier - avec eux-mêmes et la politique. Mais cette réconciliation ne se décrètera pas. Elle se méritera : en répondant aux attentes concrètes de nos concitoyens ; en se frottant à leurs quotidiens ; en leur montrant que la politique peut changer leurs vies.
Alors ne doutons plus de nous-mêmes. La réconciliation n’est jamais impossible. Elle est parfois épineuse, souvent inattendue, mais elle est toujours nécessaire. J’espère donc vous avoir réconcilié avec ce beau mot de « réconciliation ». |