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Publié par ERASME & AVERROES

Dans un entretien réalisé pour le compte de Al-Ahram Hebdo, Chérif Albert a posé 3 questions à Abdel-Raouf Al-Ridi, ancien ambassadeur à Washington et membre de la délégation égyptienne aux négociations des accords de Camp Davidque.
Eu égard au rôle singulier que joue aujourd'hui l'Egypte dans cette zone fontière entre le Machrek et le Maghreb autant qu'entre l'Orient et l'Occident, le Nord et le Sud, Regards-citoyens juge utile de mettre ces éléments à la disposition de ses lecteurs, tout en saluant la très grande qualité des élites égyptiennes, et pas seulement les élites politiques et diplomatiques, qui sont impliquées dans les nombreux processus en jeu.

Al-Ahram Hebdo : Face à l'aggravation du conflit au Proche-Orient, certains saluent la mémoire d'un Sadate visionnaire, alors que d'autres voient en lui l'origine de cette dégradation. Laquelle de ces deux interprétations partagez-vous ?
Abdel-Raouf Al-Ridi : Aucune. Moi je vois que les origines du problème remontent à la guerre de 1967 que l'Egypte a perdue. Le Sinaï fut occupé et le Canal de Suez fermé. Même la guerre de 1973 n'a pas permis de renverser cette situation. Tout ce qu'on dit sur les restrictions inhérentes dans les accords de paix est relativement vrai, mais reste la question : comment aurions-nous pu libérer notre territoire autrement ? Si au lieu de l'attaquer, les autres pays arabes avaient soutenu Sadate lors des pourparlers de paix, il aurait été possible de parvenir à un meilleur accord au niveau du volet palestinien.

Al-Ahram Hebdo : Que dites-vous à ceux qui revendiquent l'annulation des accords de paix ?
Abdel-Raouf Al-Ridi : Ceux qui demandent l'annulation des accords de paix doivent nous dire quelle sera d'après eux la prochaine étape. Envoyer des troupes au Sinaï et déclarer la guerre à Israël ? Parfois les gens font des demandes sous l'impact des émotions, mais ce n'est pas ainsi que les questions de sécurité et d'intérêt national sont traitées. Aujourd'hui, Israël est une puissance beaucoup plus forte qu'il y a trente ans. Et si jamais l'Egypte doit préserver un équilibre militaire avec Israël, c'est plutôt pour se préparer à une éventuelle folie de la part d'une personne comme Avigador Lieberman qui, lui, peut annuler de sa part les accords de paix.

Al-Ahram Hebdo : Vous faisiez partie de l'équipe des négociateurs égyptiens durant les pourparlers de Camp David. Que gardez-vous de cette expérience ?
Abdel-Raouf Al-Ridi : J'ai participé aux pourparlers de Camp David durant les mois de septembre et octobre 1978. Au moment de la signature des accords en mars 1979, j'étais déjà écarté avec nombre de mes collègues. Dès la première rencontre avec les Israéliens au Mena House, Begin (premier ministre israélien à l'époque) a commencé par attaquer l'équipe du ministère égyptien des Affaires étrangères. Nous insistions pour que les accords comprennent un engagement israélien de démanteler les colonies existantes au Sinaï et de stopper les activités coloniales dans les territoires palestiniens. Les Israéliens refusaient. Cette question a aussi envenimé nos relations avec Sadate. Lui, il avait une vision politique d'homme d'Etat, mais en tant que diplomates, c'était normal pour nous de nous intéresser aux aspects techniques. Finalement, les colonies israéliennes dans le Sinaï ont été démantelées et notre chef de la diplomatie, Ibrahim Kamel, qui avait démissionné pour exprimer son opposition à Sadate, a fini par lui donner raison.

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