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Publié par ERASME

Comme l'écrivait Albert Camus : « Mal nommer les choses, c'est ajouter du malheur au monde. » Il n'y a d'avenir pour Israël et pour les Palestiniens que si on commence par lire correctement la réalité pour envisager de l'améliorer.


Israël a engagé le 27 décembre une campagne militaire contre le Hamas dans la bande de Gaza, avec pour objectif déclaré de mettre ce mouvement hors d'état de lancer des roquettes sur les populations civiles du sud d'Israël. Après six jours de bombardements, Israël a lancé le 3 janvier une intervention terrestre (entrée de chars et de soldats israéliens). Le 11 janvier, les réservistes sont entrés dans la bande de Gaza. Au total, plus de 900 Palestiniens ont été tués et 3800 blessés, dont plus du tiers sont des femmes et des enfants. Les tirs de roquettes lancés depuis Gaza ont fait 4 victimes israéliennes, dont 3 civiles (660 roquettes depuis le début de l'offensive). 10 soldats israéliens ont été tués au cours des combats à Gaza.

La situation humanitaire à Gaza, déjà très critique du fait du blocus imposé par Israël depuis la prise du pouvoir du Hamas à Gaza (juin 2007), est profondément dégradée par ces opérations militaires ; l'ONU a décidé le 8 janvier de suspendre (pour 48h) ses activités humanitaires à Gaza, l'un de ses convois ayant été touché par des tirs d'obus israéliens.

Bien que la poursuite des actions de combats par les factions palestiniennes constituent elles aussi une source de profonde inquiétude, la poursuite des actions militaires israéliennes sur le territoire de la bande de Gaza et le recours à des armes extrêmement mutilantes dont l'usage est prohibé dans les zones à forte densité de population civile soulève de nombreuses interrogations.

Elle en soulève d'autant plus
:


a) que le Conseil de Sécurité a pris une nouvelle résolution (la résolution 1860) par laquelle :

 
  - il « appelle à l'instauration immédiate d'un cessez-le-feu durable et pleinement respecté » à Gaza, qui doit mener au « retrait total des forces israéliennes »,

  - il « condamne toutes les violences et hostilités dirigées contre des civils ainsi que tous les actes de terrorisme »,

  - il « appelle les États Membres à « redoubler d'efforts pour fournir des arrangements et garanties à Gaza afin de maintenir un cessez-le-feu et un calme durables, et notamment à prévenir le trafic d'armes et de munitions » et à « assurer la réouverture durable des points de passage sur la base de l'Accord de 2005 »,

  - il « demande que l'aide humanitaire, y compris les vivres, le carburant et les traitements médicaux, puisse être distribuée sans entrave dans tout Gaza »,
 
   - il se félicite des initiatives « visant à créer et ouvrir des couloirs humanitaires »,

  - et il appelle enfin tous les États Membres « à soutenir l'action menée à l'échelon international pour améliorer la situation humanitaire et économique à Gaza, notamment en versant des contributions supplémentaires nécessaires de toute urgence à l'UNWRA » ;


et b) que la puissance de feu constatée du côté palestinien, qui n'a rien de comparable à celle supposée avant l'offensive (ce que participe à montrer la « faiblesse » du nombre de victimes israéliennes), fait apparaître une certaine démesure dans l'intensité autant que dans la forme des assauts israéliens ; la France, qui joue un rôle central dans les négociations en cours en raison notamment de l'équilibre de ses positions diplomatiques, allant jusqu'à attacher le qualificatif de « disproportionnée » à cette intervention militaire en regard de la menace réelle.


Selon les porte paroles de l'armée israélienne, « Tsahal ne peut pas arrêter les combats maintenant. »


Pour quelles raisons Tsahal, armée d'un Etat démocratique qui, parce qu'il est doté de la puissance de feu nucléaire , doit faire montre en permanence de sa capacité à ne jamais céder à la tentation de la fuite en avant,  ne peut-elle pas arrêter les combats alors même qu'une résolution du Conseil de Sécurité de l'ONU l'y appelle ?


Est-ce avec ou sans le consentement des autorités gouvernementales qu'elle poursuit les combats ?


Les autorités gouvernementales israéliennes considèrent-elles que leurs buts et objectifs politiques n'étant pas atteints, une écrasante supériorité militaire à l'œuvre demeure un argument diplomatique central dans les négociations en cours qui portent sur des enjeux qui dépassent ceux, conjoncturels, d'une nouvelle trêve ?


Les buts et objectifs militaires de Tsahal ne seraient-ils pas encore atteints en regard de ces buts et objectifs politiques ?


Plusieurs hypothèses circulent aujourd'hui sur les buts stratégiques, politiques et militaires de l'entrée en force de l'Etat d'Israël dans ce conflit profondément « asymétrique » dont certaines participent à susciter et à alimenter des commentaires et des jugements qui ne sont de nature ni à renforcer l'efficacité des négociations entre les parties au conflit, ni à rehausser le statut de cet Etat aux yeux de ses propres partenaires, dans la Région et ailleurs dans le monde.

 

Le présent article s'attache à une investigation succincte (il ne s'agit pas d'une thèse) volontairement limitée aux 5 hypothèses les plus fréquemment évoquées dans les cercles qui « s'intéressent » à ce conflit ou, plus globalement, à cette Région.


Première hypothèse : celle de la manoeuvre politique interne articulée sur les enjeux croisés attachés aux prochaines échéances électorales (court terme) et au positionnement des généraux de la nouvelle génération dans les rapports de force politiques internes à Israël (moyen terme) !


Deuxième hypothèse : celle de la manoeuvre politique régionale articulée sur les enjeux attachés à la recomposition des rapports de force politique régionaux dans la perspective de la mise en œuvre effective, à terme, des décisions qui seront adoptées à l'issue des négociations et/ou des résolutions de l'ONU relatives au Proche Orient !


Troisième hypothèse
: celle du forçage d'un renouveau stratégique articulée sur une approche stratégique qui tendrait à confondre les intérêts stratégiques et de sécurité de l'Etat d'Israël avec ceux des Etats occidentaux en regard des risques et des menaces qui sont inhérents à une "rupture civilisationnelle" à l'œuvre !


NB : Par « forçage », on entend le fait de forcer une variable avec une certaine valeur. Un « forçage de type » consiste à modifier autoritairement le type d'une variable déjà déclarée.

Quatrième hypothèse
: celle de l'expression d'un néoconservatisme idéologique qui s'emploie à la réaffirmation formelle, par recours à la force militaire, des visées identitaires, nationalistes et coloniales qui sont historiquement attachées au mouvement sioniste !

Cinquième hypothèse
: celle de l'initiative stratégique maximaliste, qui consisterait à créer, par l'exaspération des populations et des dirigeants des pays de la Région devant le risque de remise en cause du projet de création d'un Etat palestinien - risque qu'accréditerait leur propre décodage des buts de la stratégie militaire et de la politique de colonisation d'Israël -, les conditions d'un embrasement généralisé de la Région susceptible de dégénérer en conflit mondial !

Ces différentes hypothèses, qui ne rencontrent pas le même écho dans les différents cercles d'observateurs, sont parfois couplées dans les analyses et les commentaires.


Comme le comédien Jean Yanne l'a exprimé dans son livre intitulé « J'me marre ! », je suis porté à penser que le cynisme est dans les choses et non dans le coup d'œil. Alors peut-être existe-t-il, au-delà de ces 5 hypothèses, une 6ème que l'on pourrait dès lors qualifier d'hypothèse de la surprise stratégique !

Un autre article présente un décodage de chacune de ces hypothèses (Poursuite des combats par Tsahal au Proche Orient : 5 hypothèses soumises au crible de l'analyse (2) ) , en les passant 
au crible d'une analyse empreinte non seulement de cette neutralité improbable dont tous les observateurs se targuent, mais également d'une volonté d'offrir une vision globale des facteurs qui concourent à forger les défis les plus cruciaux non seulement pour la sécurité d'Israël mais également pour celle de la Région, de ses voisins caucasiens, méditerranéens et européens, et de la sécurité internationale.

 

 

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