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Publié par Ferdinando Riccardi

Face à la situation et aux perspectives des relations entre l'UE et la Russie, résumées dans l'éditorial du Bulletin Quotidien Europe n° 9908, les opinions diffèrent. La gamme des positions est vaste, allant de la plus réticente - prudence et méfiance avec un degré modeste de coopération sur des dossiers spécifiques d'intérêt commun - à la plus ouverte : un vrai partenariat fondé sur des liens permanents et institutionnalisés.

Indispensable pour la Russie.  Je crois qu'il faudrait oser la deuxième formule, avec toutes les précautions approciées et la progressivité indispensable, mais avec des ambitions indiquées dès le départ. Pour la Russie, ce partenariat est indispensable, et elle sait. Le territoire russe correspond, selon les experts, à un huitième des terres émergées de la planète. La population - 145 millions - est intime par rapport à l'espace, et elle est en diminution. La crise démographique préoccupe sérieusement les autorités. La pression de populations asiatiques est, à certaines frontières, très forte ; un meilleur équilibre territorial s'impose. L'IFRI [a organisé] jeudi 4 juin, à Paris, un débat sur les enjeux de la crise démographique en Russie, avec Anatoli Vichevski et Emmanuel Todd ; il sera intéressant d'en connaitre les conclusions.

La Russie est en outre vulnérable à la crise monétaire ; le rouble a été sérieusement dévalué. Les recettes en euro résultant des exportations énergétiques sur le marché européen lui sont indispensables, ainsi que les investissements européens et la technologie occidentale.

Echanges culturels incomparables. L'intensité des échanges culturels réciproques est, depuis plusieurs siècles, prodigieuse. je ne me réfère pas aux échanges imposés, bureaucratiques et rigoureusement contrôlés de la période communiste, mais à tout ce qui était intervenu auparavant et a été relancé ensuite. C'est presque au hasard que je peux citer quelques aspects spectaculaires, comme la construction de Saint-Pétersbourg par des architectes pour la plupart italiens, l'adoption du ballet classique à Moscou où il a été sauvegardé (et à quel niveau !) dans la période de son déclin en Occident, l'arrivée fulgurante à Paris d'Igor Stravinski et des ballets russes ; évènements de grand effet mais presque superficiel face aux échanges réciproques permanentsen musique et en littérature, sans parler des Russes exilés qui sont devenus des grands écrivains en langue anglaise ou française. Le tout dans un climat de tolérance religieuse substantielle (la parenthèse du régime communiste mise à part), avec le dialogue permanent, même si par moments interrompu, entre les différentes Eglises : catholique, orthodoxe et protestante. Je cite cet aspect parce que l'histoire et , malheuresuement, aussi l'actualité nous apprennent que le fanatisme religieux est la source des pires crimes et des pires entorses à la vie civile. Les vraies civilisations peuvent changer la destination d'un lieu de culte qui passe d'une religion à l'autre, ainsi qu'il est arrivé à Sainte Sophie à Istanbul, au Panthéon à Rome, à des mosquées en Espagne, en respectant le passé ; mais les brutes font exploser les Bouddhas centenaires sculptés dans la pierre.

Un objectif raisonnable et toutjours en expansion. L'objetcif du partenariat futur ne peut pas comporter, et même pas envisager, l'adhésion russe à l'UE ni sa participation aux institutions communautaires, ni une monnaie commune ; chaque partie doit garder son autonomie, avec ses spécificités. Mais la réalisation progressive d'un degré élevé de coopération dans tous les domaines serait un objectif raisonnable. Les domaines de coopération déjà retenus sont nombreux et ils peuvent encore augmenter ; il suffit de songer à l'enjeu nouveau de l'Arctique, où l'Europe et la Russie pourraient agir en commun pour en faire - ensemble avec les autres pays concernés, des Etats-Unis au Canada et aux populations locales - un lieu de coopération mondiale où la sauvegarde de la nature doit prévaloir sur l'exploitation économique. L'UE doit évidemment garder ses exigences essentielles relatives au respect des droits de l'homme et de la liberté d'expression ; même en ces domaines, les progrès sont plus faciles lorsqu'on est d'accord sur les objectifs économiques et politiques de coopération (où la défense de l'agriculture devrait aussi trouver sa place).

Je suis conscient des difficultés de l'entreprise ; cette rubrique du Bulletin Quotidien Europe n° 9909 a énuméré les divergences et les obstacles aussi bien économiques que politiques, psychologiques et historiques. mais je crois que la carte de l'ambition, il faut la jouer, car elle représenterait un tournant historique notamment pour les Etats-membres de la partie orientale de l'UE, un tournant pour eux aussi significatif que celui qu'a représenté la transformations de leurs relations avec l'Allemagne en tant que membre de l'Union. Certes, la Russie doit faire elle aussi sa part du chemin. Pourquoi ne pas rêver, par exemple, qu'elle rende un jour à l'UE la ville où est né Emmanuel Kant, qui constitue une enclave russe à l'intérieur du territoire communautaire ? Ou qu'elle accepete du moins d'en faire un terriroire autonome ? 


(Ces différents éléments ont été publiés dans le Bulletin Quotidien Europe n° 9909 daté du 29 mai 2009 ; ils font suite aux articles suivants de ce blog :
* Tour d'horizon sur la réalité complexe des relations entre l'UE et la Russie (1)
* Tour d'horizon sur la réalité complexe des relations entre l'UE et la Russie (2) )

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