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Regards citoyens

Ce blog est destiné à stimuler l'intérêt du lecteur pour des questions de société auxquelles tout citoyen doit être en mesure d'apporter des réponses, individuelles ou collectives, en conscience et en responsabilité !

Attention ! Danger ! La Syrie n'est pas la Lybie ! La réponse de la communauté internationale à la dégradation de la situation en Syrie doit être non seulement graduée mais responsable !

Ici et là continuent à s'élever des voix qui appellent la communauté internationale, l'ONU, l'Union européenne, ou, de manière très 'tartarinesque', la France, à prendre des sanctions plus dures encore à l'égard du régime syrien ; un régime qui ne semble pas enclin à accorder aux revendications populaires qui s'expriment sur son territoire les mêmes réponses que celles que semblent vouloir apporter les gouvernants actuellement en place dans le cadre des processus de transition démocratique qui ont pris place en Tunisie, en Lybie ou en Egypte ! C'est le moins qu'on puisse dire ! 

Au début du printemps dernier, le secrétaire général de la Ligue arabe Nabil Al-Arabi a demandé à l'ONU, dans une lettre au Conseil de sécurité, d'agir pour assurer la protection du peuple syrien face à la sanglante répression de la révolte contre le président Bachar al-Assad. A la question de savoir s'il réclamait dans sa lettre une action militaire contre le régime du président Assad, il a répondu : "Je n'ai pas évoqué une intervention militaire".
 
Les termes employés par Al-Arabi concernant les mesures nécessaires à la protection des civils font écho à la résolution qui a permis l'intervention étrangère en Libye. Or la Russie, qui a depuis opposé son veto à plusieurs reprises à des textes de résolution concernant la Syrie, s'oppose avec détermination à une réédition du scénario libyen.      

Il ne saurait échapper aux personnes un tant soit peut aguerries aux enjeux stratégiques et de sécurité du Proche Orient et du Moyen-Orient que la Syrie n'est ni la Lybie, ni la Côte d'Ivoire ! Faut-il le rappeler eu égard à ce constat réaliste d'un vide stratégique dans les Pays européens qui se contentent de s'aligner, y compris au niveau doctinal, sur l'hyperpuissance (cf. "Le Vide stratégique", de Philippe Baumard, par Philippe Arnaud (Le Monde) ) quand bien même certaines diplomaties sont sincèrement et profondément engagées dans la recherche de solutions efficaces (cf. "POUR UNE DIPLOMATIE ENGAGEE" : Entretien avec le Président de la République), mais sans nécessairement prendre en considération les évaluations des expériences antérieures comparables.

Comme il ne saurait leur échapper non plus que l'obtention au forceps du vote de la résolution 1973 relative à la Lybie et sa mise en application immédiate par une coalition ad hoc au visage marqué d'une empreinte 'occidentalo-atlantiste' n'augurent en la matière rien de comparable s'agissant d'une Syrie placée à la croisée (sans jeu de mots) de plusieurs arcs de crise !

En outre, à la situation économique et financière des plus critique des Etats engagés aujourd'hui dans la coalition s'ajoute une inconnue supplémentaire qui rend particulièrement inconfortable la position de ceux qui s'expriment avec le plus de véhémence à l'égard de régime syrien : les pénuries et 'incapacités' qui affectent gravement la disponibilité opérationnelle de leurs moyens d'action militaire !

S'y ajoute une seconde inconnue quant aux marges de manoeuvres, notamment politiques et diplomatiques, de ces dirigeants d'Etats qui appellent à des sanctions alors qu'ils entretiennent parfois avec les processus démocratiques de leur propre pays des relations des plus critiquables, s'apparentant peu ou prou à celles qui ont été à l'origine de ces printemps arabes qui fleurissent un peu partout dans le monde arabo-musulman (cf. à cet égard Le grand chantier de l'aggiornamento arabe, par Ahmed Ounaïes (extraits d'un article paru dans la revue Défense nationale) ).

Ne serait-ce que parce que leur légitimité est de plus en plus contestée dans leur propre pays ou que leur action passée a gréver le capital de confiance dont il pouvait jouir jusqu'ici (cf. à cet égard, notamment : Manoeuvres diplomatiques : la "victoire" du camp de l'intervention en Lybie aura nécessairement un coût politique et diplomatique ! Lequel ? ; L'opération libyenne était-elle une "guerre juste" ou juste une guerre ? (Débat 'BHL / R. Brauman' - Le Monde ainsi que L'après-Gaddhafi au Sahara-Sahel )

La Syrie n'est pas la Lybie !

Imposer une zone d'exclusion aérienne à la Syrie participerait par exemple à rompre unilatéralement le délicat équilibre qui s'est si difficilement instauré dans la région ! Si cette exclusion était ensuite assurée par les meilleurs amis et alliés de l'Etat d'Israël (Etats-Unis, Royaume-Uni, France, Italie, ...), comme c'est aujourd'hui le cas en Lybie, nul besoin d'être grand prophète pour imaginer ce qu'il adviendrait du processus de paix ... et de la paix tout cours dans cette région !  

La réponse de la communauté internationale à la dégradation de la situation en Syrie doit être non seulement graduée mais responsable et réfléchie !

C'est peut-être aussi pour celà que la Russie et la Chine ne se sont pas précipités au sein du Conseil de sécurité derrière le club des bellicistes dont les dernières prestations n'incitent pas à les suivre spontanément quand il s'agit d'agir de manière coercitive (cf. Après le veto sur la Syrie, Pékin et Moscou se justifient (Le Monde) ) !

Sauf à chercher sciemment à créer les conditions d'une crise régionale des plus grave pouvant déboucher sur un conflit régional ou international (hypothèse qui avait déjà été émise parmi d'autres à propos de l'opération Plomb durci menée par Tsahal dans la zone de Gaza pendant l'hiver 2008-2009 - cf. Poursuite des combats par Tsahal au Proche Orient : 5 hypothèses soumises au crible de l'analyse (2) -), la prudence la plus élémentaire comme la responsabilité politique commandent la retenue dans les propos comme dans les actes dans ce Proche-Orient où les sables sont encore mouvants !

Crise régionale d'autant plus probable que les différends nucléaires qui opposent l'Iran à la communauté internationale et les différends énergétiques qui opposent actuellement la Turquie et la petite République de Chypre (qui va prendre le 1er juillet la tête de la présidence du Conseil de l'Union européenne) constituent déjà des motifs de tensions réellement polémogènes !

Une crise dont certains analystes envisagent que son issue pourrait favoriser le règlement de contentieux d'une toute autre nature (cf.  Géopolitique fiction : et si les printemps arabes annonçaient un vaste chantier de reconfiguration des Etats et des frontières au sud et à l'est de la Méditerranée ? (nouvelle édition) )

Cet article a été publié une première fois en avril 2011. dans une version voisine.

Voir également :

 * La responsabilité de protéger : Qui est responsable de la protection des peuples vulnérables ?

 * Le principe de la responsabilité de protéger ; avancée de la solidarité ou ultime avatar de l'impérialisme ? par Jean-Marie Crouzatier (Revue ASPECTS)

 *  Du très troublant relativisme sémantique occidental à propos de la notion de « civils »

 * La politique méditerranéenne de Nicolas Sarkozy : une vision française de la civilisation et du leadership, par Edmund Radka

 * Dépassons l'approche purement instrumentale pour traiter en Européens les questions de stabilité et de sécurité - nouvelle édition -

 * BHL comme symbole d'un temps historique (texte de Pascal Bonficae reproduit par Defenza.org)

 * Retour sur image : Syrie, les risques de la crise par Frédéric Pons (Valeurs Actuelles)

 * La Syrie extrême et l’«Empire du Milieu», par Jérôme Larcher (Grotius International)     


 

 

 

 

 

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