Ce blog est destiné à stimuler l'intérêt du lecteur pour des questions de société auxquelles tout citoyen doit être en mesure d'apporter des réponses, individuelles ou collectives, en conscience et en responsabilité !
23 Août 2012
La question européenne a toujours fait débat au sein de la gauche et il est consubstantiel à la gauche que le débat ait lieu. Je ne suis pas choqué par le débat, je le souhaite et je l'assume. Mais je veux rappeler à nos alliés que la question européenne est l'une des questions centrales du quinquennat. Le président de la république s'est engagé personnellement dans la réorientation de la politique de l'Union européenne.
Le sommet du 29 juin dernier a permis d'engager cette réorientation, mais ce qui a été décidé et obtenu à cette occasion n'est pas un solde de tout compte. Si l'on souhaite qu'il y ait des étapes ultérieures, il faut consolider la première étape. La volonté qui est la nôtre de procéder au redressement des comptes publics en France, d'engager la réindustrialisation du pays et de faire en sorte que la croissance soit possible en France dépend aussi des décisions qui seront prises au niveau européen. Et ce qui se passe en France est regardé par les autres pays de l'Union. Dans la majorité, le débat doit donc être compatible avec les principes de responsabilité et de cohérence.
En politique, il y a un temps pour tout surtout lorsque le contexte est difficile. L'Europe est un combat. On ne peut pas vouloir à la fois la réorientation de l'Union européenne, la sortie de l'austérité, l'accompagnement des peuples et ne pas soutenir un gouvernement qui s'emploie à mettre en place des mesures concrètes pour faire en sorte que les peuples soient épargnés. Ceux qui n'accompagneront pas le gouvernement dans ces efforts risquent d'être confrontés à un moment à un problème de cohérence.
Le président de la République a tenu tous ses engagements de campagne : il n'y aura pas d'inscription de la règle d'or dans la constitution et lui qui voulait renégocier le traité en le complétant a obtenu de haute lutte à Bruxelles un pacte de croissance de 120 milliards d'euros, l'engagement de l'union bancaire, davantage de solidarité financière et monétaire. J'ajoute que ces 120 milliards en représentent en réalité près de 240 car il y a 55 milliards de fonds structurels, 10 milliards de recapitalisation de la BEI permettant 60 milliards d'euros de prêts et qui appellent 120 milliards d'euros d'investissements privés.
Mais c'est 20% du budget propre de l'Union européenne (1000 milliards). Ce n'est pas une paille ! Et il y a d'autres perspectives de croissance : nous sommes en pleine négociation sur le budget 2014-2020 et nous souhaitons qu'il prolonge l'ambition de croissance. C'est la raison pour laquelle nous avons dit notre volonté de voir l'Union européenne se doter de ressources propres. Les perspectives ne sont pas négligeables, mais c'est un combat. Plus l'exécutif est soutenu par sa majorité, plus il est fort dans la capacité qu'il a à conduire la négociation.
François Hollande a été clair pendant sa campagne. Il met en oeuvre ce sur quoi il a été élu : réorienter la politique de l'Union européenne, la rééquilibrer en faveur de la croissance, et soumettre cette réorientation à l'approbation du Parlement. C'est ce que nous faisons. Et la présidentielle n'est pas un scrutin anodin.
Concernant la Grèce, nous n'en sommes pas là. La troïka des créanciers de la Grèce n'a pas encore rendu son rapport sur la situation économique du pays. Aucune demande officielle grecque n'a été formulée. En tout état de cause, toute décision serait prise après discussion avec nos partenaires européens.
Chacun des pays de la zone euro a ses contraintes et il ne faut sûrement pas les négliger. Mais il y a quelque chose de plus fort, c'est le mouvement profond qui s'inscrit dans le temps long de l'histoire, dans lequel l'Europe est engagée. La concertation franco-allemande est permanente. L'Allemagne a toujours été un partenaire avec lequel nous pouvons aller au bout de la défense des intérêts européens. Nous aboutissons toujours à des positions communes qui font avancer l'Europe.
Le principale défi qui se présente à nous est la maîtrise du temps .Après un été au cours duquel la Banque centrale européenne a pris les bonnes décisions pour limiter la spéculation sur les dettes espagnoles et italiennes, nous ne devons pas perdre de temps dans la mise en oeuvre des décisions du sommet du 29 juin. La supervision bancaire sera effective avant la fin de l'année. Elle est nécessaire pour le déclenchement des aides directes des fonds de secours aux banques espagnoles. Nous devrons ensuite avancer rapidement sur le fonds de résolution des crises bancaires et la garantie des dépôts. Notre politique s'inscrit dans une vision qui répond aux urgences de la crise mais prépare aussi l'avenir de l'Union économique et monétaire.
La difficulté de cette crise qui s'enkyste, c'est qu'elle ajoute de la crise politique à la crise économique et financière. Il y a aujourd'hui parfois, dans certaines expressions politiques, de l'euro-hostilité de principe. D'où les mouvements d'exaspération et les déclarations de tel ou tel. Mais au fond, je pense que la crise attise le besoin d'Europe et que malgré l'hostilité de certains, il existe des marges de manoeuvre pour progresser ensemble. L'Europe est un combat et doit être un instrument du progrès social, commercial et environnemental. Il faut cesser d'en parler sous un angle punitif, contraignant et sacrificiel pour qu'elle redevienne un projet porteur d'espoir.
Source : http://www.lesechos.fr/economie-politique/monde/actu/0202226258070-bernard-cazeneuve-l-europe-est-un-combat-354896.php