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Regards citoyens

Ce blog est destiné à stimuler l'intérêt du lecteur pour des questions de société auxquelles tout citoyen doit être en mesure d'apporter des réponses, individuelles ou collectives, en conscience et en responsabilité !

La fatigue du processus d'élargissement de l'UE met le projet politique européen en péril !

Comme le soulignent le professeur Quermonne (cf. Les trois principaux défis qui se présentent à l'Union européenne pour qu'elle devienne une authentique Union politique, selon Jean-Louis Quermonne ) ou d'autres observateurs attentifs (cf. notamment La vraie facture de l'élargissement : l'Europe est-elle en train de payer aujourd'hui sa gestion de la chute du mur de Berlin ? (Atlantico.fr)), l'absence de clarté quant aux limites géographiques de l'Union constitue un défi majeur pour l'avenir même du projet politique européen !

Quelques mois après le Parlement europn qui a adopté en novembre 2012 une résolution intitulée 'Politiques et critères d'élargissement et intérêts stratégiques de l'Union européenne en la matière' (cf. Le Parlement européen adopte une résolution intitulée 'Politiques et critères d'élargissement et intérêts stratégiques de l'Union européenne en la matière'), le Conseil européen a publié un état des lieux très précis du processus d'élargissement en cours ! (cf. http://www.regards-citoyens.com/article-council-conclusions-on-enlargement-and-stabilisation-and-association-process-brussels-11-december-113369937.html ainsi que http://www.regards-citoyens.com/article-etat-de-l-elargissement-de-l-union-europeenne-l-albanie-et-la-serbie-113222319.html et http://www.regards-citoyens.com/article-le-rapport-annuel-sur-l-elargissement-de-l-ue--une-volonte-claire-d-ouverture-111161875.html)

Un état des lieux qui ne peut laisser indifférents des citoyens de l'Union européenne on ne peut plus inquiets quant à l'orientation prise par le projet européen depuis plusieurs décennies.

L'UEF-France considère que la ré-unification du continent européen est sans équivoque le but historique premier de la Communauté - devenue Union - européenne. Cette entreprise apparait aujourd'hui en bonne voie et réalisable pour la prochaine génération d’européens. Mais elle est toute entière dépendante de la préservation de l'équilibre entre "unité" et "diversité" : au lendemain de l'entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, il serait utile de s'assurer que cette "unité" demeure aussi solide qu'il est nécessaire pour parvenir au but fixé .

Déjà l'UEF-France avait appelé l'attention, dès juin 2010, sur la fatigue de l'élargissement (cf. Fatigue institutionnelle et fatigue de l'élargissement - ou le dilemme unité/diversité ) en insistant sur les points suivants :

La capacité d'intégration de l'Union

Sur cette approche très ouverte de l'élargissement, le Conseil européen, la Commission et le Parlement sont à l'unisson - même si le PE a, dans le passé, lancé quelques avertissements isolés sur la nécessité de prendre aussi (d'abord ?) en comptela capacité d'intégration de l'Union avant de prendre des engagements trop précis vis à vis des Etats concernés .
Capacité d'intégration qui  - rappelons le - se décline en deux critères complémentaires :
 - capacité opérationnelle de gestion d'une Union sans cesse plus large et plus diverse : Institutions, budget , équilibres économiques et sociaux , consensus sur les grandes politiques communes (y compris la PESC ...) , etc...
 - capacité politique d'une Union "plurielle" à préserver et approfondir son intégration politique et néo-fédérale, sa marche vers une "union de plus en plus étroite de ses peuples" telle que les prescrivent les Traités.

Des critères parfois surprenants

A contrario , on est parfois surpris de découvrir les motifs (auxiliaires, admettons-le) pour lesquels l'adhésion de l'un ou l'autre candidat deviendrait soudain acceptable par l'UE - qu'il s'agisse :
 - pour l'Islande , du règlement d'un problème de remboursement d'épargnants (le cas de la banque Icesave)
 - pour la Croatie , du règlement d'un problème d'eaux territoriales (le cas de la baie de Piran)
 - pour la Macédoine , du règlement éventuel de l'appellation officielle de l'Etat ("Vardar")
 - pour la Serbie (et pour la Croatie) , du règlement des litiges avec le Tribunal Pénal International.

On est encore plus étonné d'entendre certains arguments qui plaideraient pour une date proche d'adhésion - ou d'ouverture de négociations - pour de futurs candidats, par exemple :
 - pour les Etats des Balkans, le 100ème anniversaire de l'attentat de Sarajevo en 2014
 - pour l'Ukraine ...la préparation de l'Euro 2012 ! 

Au delà de ces anecdotes, l'expérience du grand élargissement groupé de 2004 / 2007 a pourtant illustré les problèmes que cause la réalisation de promesses inconsidérées d'adhésion une fois celle-ci réalisée. Résumons les, sans commentaires détaillés, avec les termes sobres utilisés par la Présidente de Lituanie et ancienne commissaire : "Il semble que le processus politique d'élargissement soit allé plus vite que celui de l'intégration économique " ("et politique" pourrait-on ajouter ).

Un parfum de démagogie

En commentant les travaux du Groupe de réflexion présidé par Felipe Gonzales (auquel il avait été pourtant expressément demandé de ne pas aborder la question de l'élargissement - apparemment détachable de celle de l'avenir de l'Union ...) , un de ses membres a pu écrire : "Nous exprimons sans ambiguïté notre attachement collectif à la poursuite de l'élargissement à tous les candidats officiels - ce qui inclut bien sûr la Turquie . (Nous déclarons que) les vraies limites de l'Europe sont constituées par la capacité des candidats à remplir les critères d'adhésion (...) ".

Même dans l'hypothèse où ces critères d'adhésion incorporent celui de la capacité d'intégration de l'Union (ce qui est peu probable) , ce type de raisonnement politique - faisant fi de l'histoire et de la géographie "réelles" - a quelques relents dedémagogie . A ceci près qu'il ignore superbement les aspirations effectives des demos - peuples concernés (des candidats comme des Etats membres) !

Ne mentionnons même pas la question de l'information de ces peuples - outrageusement négligée par les autorités communautaires et nationales responsables - sur la signification et les implications profondes et durables de l'appartenance à l’Union. Qui leur parle d'"un destin désormais partagé" par les Etats qui forment l'Union ou d'une "union sans cesse plus étroite de ses peuples" ?

Reconnaissant le peu d'enthousiasme de ses concitoyens envers l'adhésion de l'Islande à l'UE (57% d'entre eux seraient favorables au retrait de sa candidature) , un commentateur islandais osait la remarque suivante : "Vous ne trouverez pas ici d'esprit européen ; tout est ramené à la rationalité , à ce que l'UE pourrait faire pour nous " ("Never ask what the union can do for you - etc ..." ). Il n'est pas certain qu'un tel état d'esprit ait été totalement absent des négociations d'adhésions passées et ne le soit dans les négociations actuelles.

Des équilibres difficiles

Il est de bon ton de parler de "fatigue institutionnelle" - c'est à dire de lassitude vis à vis du renforcement de la capacité d'intégration de l'UE - mais il serait politiquement incorrect de faire allusion à une "fatigue de l'élargissement", pourtant plus nettement ressentie par l'opinion publique que la première ...

Derrière cette sémantique se dissimule (mal) le difficile équilibre entre approfondissement et élargissement, équilibre qui est pourtant au coeur même de l'entreprise européenne comme le traduit admirablement la devise "Unité dans la diversité"(devise que onze Etats membres - dont la France - refusent d'ailleurs d'avaliser) .

L'accroissement considérable de la "diversité" au sein de l'UE - dû à son élargissement accéléré (et sans limites envisagées) - met à l'évidence en question son "unité" . Dès lors devient centrale la très délicate question de l'approche différenciée de l'intégration européenne (coopération renforcée, cercles concentriques, noyau dur , Europe à la carte , etc...). Question d'une redoutable complexité politique, institutionnelle et juridique qu'il va bien falloir affronter directement un jour ou l'autre !

Cette question était d'ailleurs implicitement posée au Conseil européen du 12 juin à propos de la gouvernance économique au sein de l'Eurogroupe et de l'ensemble de l’Union. Deux conceptions (assez peu élaborées à vrai dire) se sont opposées, soutenues par la France et l’Allemagne. La décision prise semble avoir privilégié le statu quo - c'est à dire la limitation de la capacité de l'Eurogroupe à délibérer de façon autonome de son organisation et de son développement. Le même jour, le Conseil européen confirmait l'élargissement de l'Eurogroupe à un nouvel Etat membre (l'Estonie) ...

Cette position extrêmement bien charpentée de l'UEF-France n'a manifestement pas inspiré les auteurs du document endossé par le Conseil européen de décembre 2012.

Pourtant, en 2009 déjà, un rapport réalisé par des personnalités européennes de premier plan avait appelé à prendre acte des difficultés soulevées par l'adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie en recommandant d'emprunter une 'troisième voie ' pour les prochains élargissements de l'Union européenne (cf.  Un rapport recommande une ' troisième voie ' pour les futurs élargissements de l'Union européenne )

Or les nouveau pays candidats dont il est désormais question présentent des caractéristiques qui ne sauraient laisser indifférents les plus eurobéats en raison des sources d'instabilité et d'insécurité qu'ils recèlent ainsi que leur voisinage, pour eux-mêmes d'abord, pour l'Union européenne ensuite.

Eu égard à la manière dont les conditionnalités posées ont été suivies d'effet lors des processus précédents, il y a matière à s'inquiéter plus que de coutume !
Les citoyens européens sont en droit de connaître le détail des processus et des acteurs qui ont conduit le Conseil européen à endosser l'état des lieux évoqué supra sans y apporter un commentaire politique !
L'heure est venue d'instituer un véritable contrôle démocratique de ce processus ésotérique qui recèle tant d'incertitudes quant à son incidence sur la stabilité, la cohésion et la sécurité de l'Union européenne !
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M
Fatigue of the enlargement process of the EU is the European political project in peril! very interesting and informative share you have here for the followers of the page. I can say that this is a reliable update about some of the best and most talked about news update.
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P
Les propositions de la Commission sur la réforme du Statut et de la "méthode" étaient responsables et équilibrées - et soutenues par le PE. Mais le RU, les Pays-Bas et (je crois la Rép. tchèque)<br /> ont bloqué toute décision du Conseil par leurs exigences réductrices inacceptables pour la survie du SPE (service public européen). Le Conseil s'est ainsi trouvé 3 fois dans l'illégalité : sur<br /> l'application de la méthode pour les salaires en 2011 et 2012 et pour la réforme globale elle-même. La Cour a déjà censuré le Conseil la première fois sans réaction de sa part et le fera sans doute<br /> à nouveau sans qu'il réagisse : cela s'appelle un "contempt of Court" ... En fait, le dossier est à présent sur la table du ...Conseil européen dans le cadre de l'établissement du CFP - Conseil<br /> européen qui "n'exerce pas de fonction législative" selon art. 15§1 !
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