Le Comité permanent de coopération opérationnelle en matière de sécurité intérieure (COSI)
L'Union européenne va bientôt disposer d'un nouvel organe pour accroître la coopération " de terrain " en matière
de sécurité intérieure. Les représentants permanents des Etats membres auprès de l'UE ont adopté le 10 février 2010 la décision portant création du Comité permanent de coopération
opérationnelle en matière de sécurité intérieure - COSI -. Basé à Bruxelles, auprès du Conseil de l'UE, le COSI a vu officiellement le jour à la fin du mois de février 2010, juste après
avoir obtenu le feu vert définitif des ministres européens de l'Intérieur, le 25 février.
Le COSI a pour principal tâche de faciliter, promouvoir et renforcer la coordination des actions opérationneles entre les Etats membres de l'UE dans le domaine de la sécurité intérieure. Ce rôle
de coordination concerne notamment la coopération policière et douanière, la protection des frontières extérieures et la coopération judiciaire en matière pénale pour ce qui relève de la
coopération opérationnelle dans le domaine de la sécurité intérieure. Le COSI a également pour tâche d'évaluer l'orientation générale et l'efficacité de la coopération opérationnelle en vue
d'identifier les éventuelles lacunes et adopter des recommandations pour y remédier. Il peut également inviter des représentants d'Eurojust, d'Europol, de Frontex et d'autres organismes. Le COSI
est en outre chargé - de même que le Comité politique et de sécurité - COPS - d'assister le Conseil au titre de la " clause de solidarité " (article 222 TFUE) qui prévoit que l'UE "
mobilise tous les instruments à sa disposition " pour porter assistance à un Etat membre qui fait l'objet d'une attaque terroriste ou est victime d'une catastrophe naturelle ou d'origine
humaine (cf. Terrorisme, catastrophes naturelles ou d'origine humaine, clause de solidarité, et protection civile dans le Traité de
Lisbonne ainsi que L'UE face aux
catastrophes naturelles ou d'origine humaine selon le Traité de Lisbonne).
La tâche prioritaire du COSI va au développement, à la gestion et à la mise en oeuvre de la Stratégie européenne de sécurité intérieure (cf. La stratégie de sécurité intérieure de
l'Union européenne : "Vers un modèle européen de sécurité" ainsi que L'Union européenne progresse dans la mise en
place d'un plan européen de sécurité intérieure). Le COSI pourrait aussi se voir confier d'autres travaux. Par exemple, le ministre français de l'Intérieur, Brice Hortefeux, a suggéré en
décembre 2009 que la mise en oeuvre d'un futur pacte européen contre la drogue soit un " test opérationnel " pour le COSI.
Pour autant, le COSI ne participera ni à l'élaboration des actes législatifs ni à la conduite d'opérations. Le COSI
n'a pas non plus vocation à remplacer le Comité de l'article 36 (CATS) et le comité stratégique sur l'immigration, les frontières et l'asile (CSIFA) dont les activités seront réévaluées par le
COREPER avant le 1er janvier 2012.
Les membres du COSI sont choisis parmi les administrations nationales de chaque pays, mais leur nombre est limité pour veiller à l'efficacité des travaux. Les délégués nationaux du COSI sont
assistés par les représentations permanentes des Etats membres auprès de l'UE ainsi que par le secrétariat général du Conseil. Enfin, le Comité soumet régulièrement un rapport sur ses
activités au Conseil, lequel informe le Parlement européen et les Parlements nationaux (donc a posteriori).
La création de ce nouveau comité, pour importante et conforme
aux dispositions du Traité de Lisbonne qu'elle soit, permettra-t-elle à elle seule à l'UE de faire face aux nouveaux défis de sa gouvernance sur un registre comme celui de la sécurité où
s'entremêlent des enjeux, des conceptions, des dimensions, des architectures, des cadres juridiques et opératoires, des instruments et des logiques aussi complexes que variées (cf. L'Union doit faire face aux nouveaux défis de sa gouvernance (1), L'Union doit faire face aux nouveaux défis de sa gouvernance (2-A) ainsi que L'Union doit faire face aux nouveaux défis de sa gouvernance (2-B)) ?
Demeurent en effet toujours sans réponse les questions
suivantes :
- comment l'UE peut-elle assurer la cohérence de ses analyses, décisions et actions en matière de sécurité rendue nécessaire par la double nature globale et indivisible de la
sécurité ?
- comment se positionne la Stratégie européenne de sécurité intérieure vis-à-vis de la Stratégie européenne de sécurité ? Quelle forme d'articulation envisage-t-on
au sein de l'UE entre ces deux " stratégies " ?
- quelle articulation envisagée entre le COPS et le COSI (ainsi que le SITCEN et les organes de même nature) ?
- quels impacts peut avoir sur les performances du COSI l'absence de doctrine de l'UE en matière de Sécurité nationale, ce dernier registre recouvrant en très grande partie celui
de la sécurité intérieure en même temps qu'il recouvre d'autres dimensions de la sécurité (extérieure, globale, sécurité/défense) ?
- quelles formes les Etats membres entendent-ils donner à la coordination et à la coopération, au sein de l'UE, entre les services des administrations nationales compétentes en matière de
sécurité nationale, conformément aux dispositions des articles 73 et 74 TFUE (cf. De la Sécurité nationale dans le Traité de
Lisbonne - première partie - (nouvelle édition) ; De la Sécurité nationale dans le Traité de
Lisbonne - deuxième partie - (nouvelle édition) ainsi que De la Sécurité nationale dans le Traité de
Lisbonne - troisième partie - (nouvelle édition) ) ?
- selon les réponses qui seront données aux questions précédentes, faut-il ou non créer un COSN (Comité permanent de coopération et de coordination opérationnelles en matière de sécurité
nationale) ou élargir le mandat du COSI à des questions nouvelles relevant plus spécifiquement de la Sécurité nationale ?
- les Etats membres de l'UE sont-ils tous en capacité d'aller de l'avant en matière d'intégration politique
et opérationnelle sur ces registres (cf. notamment Quelques commentaires relatifs à la
création, en France, du Conseil de défense et de sécurité nationale) ? Si tel n'était pas le cas, est-il envisageable de mettre en oeuvre la clause dite de "frein / accélérateur " qui
est de pleine'application dans le domaine de la sécurité intérieure (cf. Traité de Lisbonne : la clause dite de 'frein/accélérateur') ?
- Est-il envisageable de mettre en oeuvre la clause de flexibilité dans le domaine de la sécurité nationale (cf. Traité de Lisbonne : La clause de flexibilité) ?
- Quels schémas de contrôle parlementaire sont envisagés, en respect des dispositions des protocoles sur la subsidiarité et sur les Parlements nationaux, par exemple ?
L'épisode récent où la CIA lança une alerte à l'endroit des ressortissants américains séjournant ou en transit en
Europe (cf. à cet égard les articles suivants : Les ministres de l'intérieur de l'UE
s'interrogent sur la réalité de la menace terroriste (Le Monde) ainsi que Alerte au terrorisme : les USA s’invitent à la réunion de
l’UE, le SitCen renforcé) suffit en lui-même à illustrer l'urgence de réponses aussi précises qu'efficaces à de telles interrogations.
Source : Agence Europe
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