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Publié par ERASME

C'est l'un des plus grands projets d'usine au monde. Un investissement de 5 à 10 milliards de dollars (4 à 8 milliards d'euros), étalé sur quelques années, s'est réjoui, le 14 août, Gita Wirjawan, le ministre indonésien du commerce. L'affaire n'est pas encore bouclée, mais Djakarta est prêt à dérouler le tapis rouge pour Foxconn. L'industriel taïwanais, principal sous-traitant d'Apple, envisage de bâtir sur place un site énorme, capable d'assembler 3 millions d'iPad, iPhone et autres appareils électroniques par an. Certains évoquent la création à terme d'un million d'emplois !

Le projet, sur lequel Foxconn reste discret, est emblématique de la nouvelle carte mondiale de l'industrie qui se met en place. Bien sûr, la Chine reste de loin le premier pays au monde où les usines sortent de terre. L'an dernier, les seuls groupes étrangers y ont injecté 108 milliards de dollars dans de nouvelles installations, selon les pointages des Nations unies. Le Brésil, l'Inde et les Etats-Unis, qui suivent au classement, ont dû se contenter d'environ 60 milliards de dollars chacun.

Mais de mois en mois, la Chine perd un peu de sa suprématie dans les choix d'implantation des industriels, au profit d'autres pays émergents, en Asie, mais aussi en Afrique du Nord ou aux lisières de l'Union européenne.

RECUL NET EN JUILLET

Depuis début 2012, les investissements étrangers en Chine (y compris dans le cadre d'acquisitions) ont fléchi de 4 % par rapport à la même période de 2011, avec un recul particulièrement net en juillet. La part du pays dans les nouveaux projets s'est légèrement tassée au premier semestre, à 8 %, confirme le recensement effectué par le cabinet fDi Intelligence.

Dans le même temps, Toyota a annoncé la construction d'une quatrième usine au Brésil, le turc Jeanci l'agrandissement de son site textile en Serbie, tandis que, dans les cosmétiques, l'indien Emani va installer des machines en Egypte et au Bangladesh...

Colgate a acquis des terrains dans le Gujarat et l'Andhra Pradesh pour fabriquer du dentifrice et des brosses à dents. Au premier semestre, les investissements étrangers ont grimpé de 30 % en Indonésie, de 40 % en Inde, et ont rebondi de 45 % en Tunisie après le printemps arabe de 2011.

Le cas de Foxconn est parlant. Jusqu'à présent, ce groupe fabriquait avant tout en Chine, dans des conditions limites : salaires minimalistes, horaires extensibles à l'infini, usines explosives... Montré du doigt aux Etats-Unis, contesté sur place, le fournisseur d'Apple a dû relever ses salaires de plus de 20 % début 2012 et a dû revoir ses méthodes. A présent, sans abandonner la Chine, il étudie des implantations en Indonésie, mais aussi au Myanmar (ex-Birmanie), deux pays où les salaires sont nettement inférieurs. Question de compétitivité.

De la même façon, Vancl, un groupe chinois d'habillement, a commencé à transférer la fabrication de ses articles les plus basiques au Bangladesh. Un ouvrier y revient 75 à 80 dollars par mois, contre environ 400 dollars en Chine, explique Vancl. Adidas vient aussi de fermer sa dernière usine chinoise détenue en propre.

"De tous les pays, le Bangladesh affiche les coûts les plus faibles", confirme Margaux Fildier, qui s'occupe des achats pour Delta Plus, un groupe de gants et autres articles de protection. "Face à la hausse des salaires en Chine, tout le secteur textile s'interroge et regarde des pays comme le Bangladesh, l'Inde ou le Pakistan."

Ce n'est sans doute qu'un début. Les coûts salariaux sont déjà plus élevés en Chine qu'au Vietnam, en Indonésie, ou encore en Inde, mais aussi qu'en Algérie, en Bulgarie, en Tunisie, en Egypte, au Maroc et même qu'en Roumanie, souligne une étude publiée en juin par Natixis. A la clé, une prédiction choc : entre la hausse des rémunérations et celle du yuan, le coût salarial en Chine en monnaie commune sera au niveau des Etats-Unis dans quatre ans, de la zone euro dans cinq ans, et du Japon dans sept ans ! "La Chine ne sera bientôt plus un endroit compétitif pour produire", prévoient Patrick Artus et Bei Xu, les experts de Natixis. Même si la productivité des ouvriers chinois s'accroît, "cette perte impressionnante de compétitivité-coût va conduire à de fortes délocalisations d'activités".

Emmanuel Gros, responsable pour la Chine du fabricant de systèmes de pompage PCM, est plus nuancé. "C'est vrai, le salaire minimum augmente d'environ 20 % par an depuis trois ans, dit-il. Mais dans notre zone industrielle, à Suzhou, cela laisse un écart de presque 1 à 10 avec la France. Quand vous utilisez beaucoup de main-d'œuvre, c'est intéressant. En outre, s'implanter en Chine permet d'être bien traité par tous les fournisseurs qui sont ici. Et surtout, l'Asie reste un marché en forte croissance !"

En résumé, ouvrir une usine en Chine pour vendre aux Chinois, oui. Le faire pour exporter des produits à bas prix dans le reste du monde, de moins en moins. C'est d'ailleurs le souhait de Pékin, qui entend muscler son industrie. Quitte à laisser la place à d'autres pays pour le très bas de gamme.

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R
On en veut encore traité de cette manière. Sympa.
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