Les Etats-Unis cherchent à désamorcer une crise à l'Onu
L'administration américaine multiplie les contacts avec des représentants israéliens et palestiniens et fait pression sur de nombreuses capitales pour éviter que le projet de reconnaissance d'un Etat palestinien à l'Onu ne donne lieu à une crise diplomatique.
L'Assemblée générale annuelle de l'Onu s'ouvre le 19 septembre et, malgré les objections américaines et israéliennes, l'Autorité palestinienne reste fermement décidée à en devenir membre à part entière à cette occasion.
Dennis Ross, directeur de la planification politique au département d'Etat, et David Hale, émissaire au Proche-Orient, ont rencontré mardi le chef du gouvernement israélien, Benjamin Netanyahu, et le ministre de la Défense, Ehud Barak. David Hale devait en outre s'entretenir cette semaine avec Mahmoud Abbas, président de l'Autorité palestinienne.
La secrétaire d'Etat Hillary Clinton, qui a eu ce dernier au téléphone mardi, l'a exhorté à écouter attentivement le message des diplomates américains et à "continuer à travailler dur avec (eux) pour éviter un scenario négatif à New York", a déclaré Victoria Nuland, porte-parole du département d'Etat.
" Nous allons continuer à travailler, si nécessaire jusqu'à l'Assemblée générale, pour ramener les parties à la table des négociations et nous continuerons à le faire ensuite. Nous continuerons à nous opposer aux initiatives unilatérales aux Nations unies et nous le ferons savoir aux deux parties ", a-t-elle souligné.
Washington craint que le projet palestinien n'hypothèque la relance des négociations israélo-palestiniennes, rompues il y a un an lors du refus par Benjamin Netanyahu de prolonger le moratoire sur les mises en chantier dans les colonies juives de Cisjordanie.
En Israël, on redoute l'isolement et on soupçonne les Palestiniens de chercher à obtenir une reconnaissance internationale pour porter le conflit sur le terrain de la justice internationale.
Pour le moment, l'Autorité palestinienne a le statut d'" entité invitée à participer en qualité d'observateur aux sessions et aux travaux de l'Assemblée générale et ayant un bureau permanent au siège de l'Onu ".
Une adhésion de plein de droit à l'organisation supposerait l'accord du Conseil de sécurité, or les Etats-Unis ne manqueront pas de recourir à leur droit de veto pour s'y opposer.
L'Autorité palestinienne pourrait toutefois demander le statut d'"Etat non membre" invité en qualité d'observateur, accordé au Vatican ou la Suisse jusqu'à son adhésion en 2002.
Ce passage d'"entité" à "Etat non membre", qui pourrait être interprété comme une reconnaissance implicite, ne demande qu'un vote à la majorité simple de l'Assemblée générale, ce qui semble aisément accessible.
L'obtenir permettrait aux Palestiniens de signer des traités tels que le Statut de Rome qui définit les règles de fonctionnement de la Cour pénale internationale (CPI). Ils pourraient dès lors la saisir, ce qui ne serait pas du goût des Israéliens.
Pour désamorcer la crise, Barack Obama a proposé en mai une reprise des négociations de paix sur la base de la reconnaissance des frontières d'avant 1967, mais s'est heurté au refus de Benjamin Netanyahu, qui a jugé le plan inapplicable.
Depuis, les Etats-Unis sont à la recherche d'un "plan B". (voir )
Washington a notamment fait savoir à l'Autorité autonome que certains élus américains opposés à son initiative pourraient demander une suspension de l'aide bilatérale. " Nous ne menaçons pas, mais nous nous assurons qu'ils entendent les voix qui s'élèvent de plus en plus fort au Congrès ", a souligné Victoria Nuland.
Un élu républicain a déposé la semaine dernière une proposition de loi visant à couper les fonds à toutes les agences de l'Onu qui reconnaîtraient un nouveau statut à l'Autorité palestinienne. Washington est le premier contributeur du budget de l'Onu.
Les Etats-Unis s'inquiètent en outre de voir grossir les rangs des partisans du projet palestinien au sein de la communauté internationale et les diplomates américains ne manquent pas une occasion de les en dissuader. L'Union européenne elle-même est divisée sur le sujet. ()
Côté palestinien, on assimile cette mobilisation diplomatique à du "mépris".
" Le sujet n'est pas la colonisation, l'indépendance palestinienne ou les droits des Palestiniens, ni même l'arrêt des actes criminels des colons aux dépens du peuple palestinien. Tout cela est ignoré et le seul sujet qui vaille est celui des Nations unies ", déplore Yasser Abed Rabbo, secrétaire général de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP).
" Cela n'exprime pas seulement du mépris à l'égard de la position palestinienne, mais aussi du dédain pour ce qui se passe dans le monde arabe ", poursuit-il évoquant le "printemps arabe" et sa quête de justice et de démocratie.
Source : Reuters