"Les pays occidentaux redoutent des actions terroristes de représailles", par Jean-Pierre Stroobants, correspondant du Monde à Bruxelles
Les experts soulignent que les révolutions dans les pays arabes ont déstabilisé leurs services d"Cette mort va encourager les tendances centrifuges au sein d’Al-Qaida"e sécurité chargés de la lutte contre le terrorisme.
Pour une série d'experts, la mort du leader d'Al-Qaïda multiplie les risques d'actions de représailles, notamment en Europe, mais plus généralement contre les citoyens occidentaux dans le monde. Même si l'action des groupes liés idéologiquement à la mouvance qu'il dirigeait était depuis longtemps " franchisée ", c'est-à-dire largement autonome, il parait évident à ces experts que des activites pourraient vouloir vanger la mort d'un homme qui était pour eux " une icône ", selon la formule de l'ESISC, un centre européen spécialisé dans la stratégie et la sécurité, à Bruxelles. " Il a inspiré des milliers d'adeptes et des dizaones de mouvements ", rappelle cette organisation.
" Il faut, en outre, souligner que les groupes et les individus associés à Al-Qaïda étaient aussi liés personnellement à son leader en vertu du principe du ba'ayt ", qui instaure l'allégeance à l'égard du guide spirituel, poursuit l'ESISC.
" Certains voudront peut-être montrer leur colère, d'autres voudront seulement prouver que le djihadisme international représente toujours une menace " souligne un expert européen du contre-terrorisme, sous le sceau de l'anonymat. Comme d'autres, il estime que les principales zones de risque sont désormais les pays occidentaux mais surtout leurs intérêts au Moyen-Orient, en Afrique du Nord, au Sahel ou en Asie centrale. Certainsn gouvernements jugés " renégats ", ou plus ou moins associés aux actions militaires en Lybie ou en Afghanistan, pourraient devenir d'autres cibles.
Certains pays, comme le Japon, ont déjà annoncé le renforcement de la protection de leurs installations stratégiques, notamment militaires. Les mesures de sécurité seront aussi renforcées en Allemagne, un des pays européens qui figure en tête de la liste des cibles potentielles des djihadistes en raison notamment de son engagement en Afghanistan.
" L'un des attentats que l'on peut redouter viserait symboliquement un pays qui a abrité, à Hambourg, les concepteurs des attentats du 11 septembre 2001 ", souligne un spécialiste du renseignement. " La mort de Ben Laden, cumulée aux interrogations sur l'attentat de Marrakech ou aux conséquences possibles de l'intervention en Lybie sur les populations arabes (NDLR : sans oublier la tentative d'assassinat de M. Khadafi par l'Otan), porte le niveau d'alerte au seuil maximal ", précise un expert des questions de sécurité.
" Tournants "
Divers analystes soulignent que les révolutions survenues en Egypte, en Tunisie et au Yément ont déstabilisé des structures sécuritaires et antiterroristes sur lesquelles s'appuyaient les Occidentaux. " On n'a pas encore mesuré précisément l'effet de ces changements qui pourraient entraîner une diversification des menaces ", souligne un membre du Service diplomatique d'action extérieure.
" Nous allons aborder d'autres tournants importants, souligne-t-il. Et notamment des élections aux résultats imcertains. les premières d'entre elles, en Tunisie, pourraient être marquées par une victoire des Frères musulmans ou de leurs affiliés avec, là encore, des conséquences difficilement prévisibles. "
La diplomatie européenne est hésitante face aux suites des révolutions arabes et intègre désormais ce paramètre dans ses évaluations du risque terroriste. " On peut croire à un scénario démocratique, 'à la turque' avec des partis islamistes 'modérés' comme l'AKP ; on peut prédire des évolutions moins rassurantes ", diagnostique ce diplomate.
Les capitales européennes scrutent aussi le rapprochement entre les deux composantes du mouvement palestinien. " Si la Palestine retrouve un leadership et si Israël prend enfin ses responsabilités, un abcès de fixation sera crevé et la mouvance djihadiste aura perdu, en l'espace de quelques jours, deux de ses principales références et, cela, c'est positif ", souligne un autre diplomate.
Voir également à ce sujet l'interview de Jean-Pierre Filiu, spécialiste du djihadisme, publié dans l'article du Monde intitulé " Cette mort va encourager les tendances centrifuges au sein d’Al-Qaida " : http://www.lemonde.fr/ameriques/article/2011/05/02/cette-mort-va-encourager-les-tendances-centrifuges-au-sein-d-al-qaida_1515595_3222.html