Ce blog est destiné à stimuler l'intérêt du lecteur pour des questions de société auxquelles tout citoyen doit être en mesure d'apporter des réponses, individuelles ou collectives, en conscience et en responsabilité !
2 Mai 2012
Voir la première partie de l'article : Malgré les avancées substantielles qu'il rend juridiquement possibles, le Pacte budgétaire et fiscal ne résoud pas la totalité des défis auxquels sont confrontés l'euro et l'eurozone ! (1)
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La seconde raison est d'ordre doctrinal.
Au-delà des facteurs conjoncturels de cette période et des (mauvais) choix de politique économique qui, en privilégiant la rigueur et l'austérité et, en s'interdisantde ce fait toute relance par les investissements, accentuent mécaniquement le problème des déficits et de la dette souveraine des Etats membres de l'eurozone (cf. notamment à cet égard http://www.touteleurope.eu/fr/actions/economie/euro/presentation/comparatif-l-austerite-en-europe.html ainsi que La rigueur, mais aussi la croissance (Déclaration du CEO de Notre Europe)) malgré des initiatives trop peu connues de la Commission européenne en la matière (cf. Les propositions de la Commission européenne en matière budgétaire et économique), il y a incontestablement des insuffisances de nature systémique et/ou structurelle qu'il est devenu urgent d'affronter, en responsabilité et en toute transparence !
Sous l'influence de l’Allemagne, il a été interdit dans les Traités européens de pratiquer une autre monétisation que celle qui profite, de fait, quasi uniquement aux banques. Il est constitutionnellement interdit de faire des avances directement au Trésor des Etats au même taux qu’aux banques. Il est aussi interdit à la BCE d’acheter directement de la dette des Etats à l’émission de cette dette (et donc qu'elle devienne 'prêteur en dernier ressort'), tout au plus, lui est-il permis, et là encore en prenant une certaine liberté avec les textes, d’acheter de la dette sur le marché secondaire pour ’fausser’’ le marché par cette offre nouvelle qui fait baisser les taux et ceci afin d’éviter de trop fortes pertes aux banques qui ont de la dette souveraine….
Mais ce pari est une fuite en avant. Il pousse le système dans ses logiques ultimes jusqu’à l’absurde, tout en ne réglant rien des déficits structurels des pays du Sud de la zone euro. (cf. à cet égard Ce dont il faudrait absolument réussir à convaincre Angela Merkel pour sauver la zone euro ! par Jean-Luc Schaffhauser (Atlantico)).
Partant d'une analyse sans concession des erreurs qui ont abouti à la panique actuelle, l'économiste Michel Aglietta ouvre le débat : " s'il n'est pas possible de consolider les dettes sans se créer un avenir commun, comment sortir de cette spirale descendante ? La voie de la croissance reste ouverte. Mais elle exige des choix forts. L'accord européen du 9 décembre 2011 introduit un début de gouvernance commune mais reste prisonnier d'un carcan de règles sans véritable action collective. Cet accord ne trace pas la voie d'une sortie de la crise par la croissance. Car la dérive des finances publiques traduit une crise beaucoup plus profonde, qui trouve son origine dans les choix opérés lors de la création de la monnaie unique. Incapable de contrer la polarisation des économies entre un centre industriel toujours plus compétitif et une périphérie dopée au crédit, la zone euro reste minée par les divergences politiques sur la finalité de la construction européenne [cf. à cet égard notamment Angela Merkel et Nicolas Sarkozy ne partagent - toujours - pas la même vision de l'Europe ! ]. L'avenir de l'euro demeure incertain ».
D'autres économistes, et non des moindres (notamment Jacques Sapir) considèrent que ce traité ajoute encore aux lacunes graves de la monnaie unique introduite pour répondre à d'autres motivations que des motifs économiques (cf. à cet égard Pour Jacques Sapir, la sortie de l'euro est inévitable).
Eu égard aux difficultés économiques et sociales considérables que connaissent aujourd'hui la quasi totalité des pays ancrés dans la zone euro, on peut s'interroger sur l'absence dans les décisions de ces sommets européens à répétition de dispositions ayant trait à la protection des plus démunis face à la crise et dont le nombre ne cesse de croître dans des proportions qui ont de quoi inquiéter les populations (cf. Attention à ne pas laisser de côté la dimension sociale lors de l'élaboration des instruments de gouvernance économique ! (nouvelle édition)).
Par ailleurs, les élites politiques, technocratiques et économiques qui s'attèlent à la recherche de solutions aux problèmes graves du moment semblent avoir écarté de leurs préoccupations communes (ou en tout état de cause, n'agissent pas avec l'efficacité attendue en ce sens) les pistes d'effort qui devraient être explorées à l'égard de trois autres dimensions clé de la stratégie monétaire européenne :
* la nécessité d'une ouverture au sein de l'UEM d'un cadre propice au développement d'un processus de coordination budgétaire et fiscale qui ouvre la voie à plus de convergence, voire même à une harmonisation que d'aucuns jugent aujourd'hui souhaitable bien qu'elle ait été rendue juridiquement improbable par des dispositions restrictives du traité en la matière (une mention excluant une harmonisation apparaissant à plusieurs reprises dans le Traité de Lisbonne),
* la nécessité de revisiter l'ensemble des garanties de sécurité, des mesures de confiance et des mesures de réassurance qui doivent garantir la sécurité et la stabilité de l'euro afin d'en accroitre l'effectivité et l'efficacité,
et enfin,
* la nécessité de revisiter l'ensemble des garanties de sécurité, des mesures de confiance et des mesures de réassurance qui doivent garantir la sécurité économique et financière de la zone euro afin d'en accroitre l'effectivité et l'efficacité !
Engagements après engagements, garanties après garanties, la valse des mesures visant à assurer et à rassurer sans y parvenir est entrée dans sa phase la plus frénétique ... et la plus critique !
Sans écarter d'un revers de main dédaigneux celle d'un retour à un euro reconsidére en tant que monnaie commune et non unique comme le suggèrent certains économistes lucides qui ne sauraient être taxés d'antieuropéanisme primaire (tel que, par exemple Jacques Sapir - cf. Pour Jacques Sapir, la sortie de l'euro est inévitable) en prenant appui sur une évaluation sérieuse des processus qui ont été engagés depuis l'entrée en vigueur de la monnaie européenne (cf. notamment à cet égard Retour sur images : Examen de la convergence pour l'entrée de la Grèce dans la zone euro au 1er janvier 2001 (Banque de France)) !
Parmi les premières garanties à produire figure bien évidemment celle de la solvabilité de la Banque centrale européenne (cf. à cet égard La Banque Centrale Européenne risque-t-elle d’exploser en prêtant aux banques ? par Georges Ugeux)
De toute évidence garantir à tout-va, quand on est hyperdendetté comme le sont aujourd'hui les Etats membres de l'eurozone autant que le Royaume-Uni, revient à ne plus rien garantir du tout (cf. Garantir à tout-va revient, quand on est hyperendetté, à ne plus rien garantir du tout ! (nouvelle édition). Car les volumes monétaires et financiers en jeu sont tels que garantir sans disposer d'une couverture de risque supplémentaire crédible qui garantisse l'activation effective de ces mesures le moment venu, revient à prendre " les enfants du bon dieu pour des canards sauvages " ! Et rien n'est véritablement entrepris pour agir là où le bat blesse le plus douloureusement (cf. La très étrange absence de la question technologique dans les agendas multilatéraux consacrés à la régulation financière internationale).
L'heure est venue, pour les Etats, comme pour les institutions financières internationales et les banques centrales, de prendre des mesures de réassurance crédibles afin que les protagonistes des atteintes quotidiennes à la stabilité et à la sécurité, monétaires et financières, soient réellement dissuadés de poursuivre leur jeu spéculatif ravageur ! Comment accepter que les Etats payent jusqu'à 800 fois plus d'intérêt que les banques ? (cf. Pourquoi faut-il que les Etats payent 600 fois plus que les banques ? par Michel Rocard et Pierre Larrouturou (Le Monde)) !
Et qui ignore que ledit traité a très peu de probabilité d'être ratifié par la France eu égard aux contraintes de son agenda électoral ?
L'heure n'est plus à la politique spectacle ni à la communication, mais à la mise en oeuvre d'une véritable stratégie opérationnelle dépourvue d'arrières pensées électorales nécessairement court termistes !
Pourquoi a-t-on voulu doter la politique monétaire européenne d'un concept stratégique articulé sur des 'conditions institutionnelles' et des 'orientations' (cf. à cet égard les articles suivants : De la notion de 'concept stratégique" dans le domaine de la politique monétaire ainsi que Les trois phases de l'Union économique et monétaire) sinon, d'une part, pour permettre la cohérence de l’analyse économique en la recoupant avec l’analyse monétaire, notamment au sein de l'UEM qui est animée par une double dynamique : son pilier économique et son pilier monétaire (4ème orientation), et, d'autre part, pour apprécier les effets complexes des chocs et ne pas « surréagir » dans le cas de chocs ne comportant pas nécessairement d’effets de moyen terme, en plaçant la stratégie monétaire dans une perspective de moyen terme (2ème orientation) ?
De toute évidence, bien que celà soit nécessaire et fasse aujourd'hui l'objet dudit traité, il ne suffira certainement pas de travailler à l'adaptation des conditions institutionnelles inscrites dans ce concept stratégique (comme le Pacte de stabilité et de croissance aui ne constitue uniquement que la quatrième condition institutionnelle selon la classification proposée par Jean-Claude Trichet) à l'objectif de sortie de crise économique et sociale, pour que l'euro et la zone euro ne sortent pas trop affaiblis de cette période crisogène exceptionnellement déstabilisante où ni la croissance, ni l'emploi, ni la confiance ne sont au rendez-vous !
Il semble par conséquent de bonne politique de s'interroger sur la pertinence du concept stratégique actuel, ou tout au moins, sur la suffisance de ses orientations pour apporter les garanties de sécurité, les mesures de confiance et les mesures de réssurance indispensables à la sécurité monétaire de l'euro comme à sécurité économique et financière de la zone euro dans une période propice à la superposition de crises systémiques multiples !
Qui peut imaginer une seule seconde que tel n'est pas le cas aux Etats-Unis s'agissant de la sécurité monétaire du dollar et de la sécurité économique et financière de la zone dollar ?
Au-delà de ces deux premières dimensions, un certain nombre d'acteurs européens ont compris la nécessité d'une ouverture au sein de l'UEM d'un cadre propice au développement d'un processus de coordination budgétaire et fiscale qui ouvre la voie à plus de convergence, voire même à une harmonisation rendue juridiquement improbable eu égard aux dispositions restrictives du traité en la matière ! L'UEM a incontestablement besoin que l'on revoie son économie générale !
Cette révision doit conduire à trois évolutions majeures :
a) revoir les processus de passage d'une phase à la suivante en durcissant les critères de passage et en précisant les conditions exigées pour s'y maintenir,
b) rendre possible, selon des modalités à préciser, un retour en arrière d'un Etat membre dont les difficultés structurelles ne lui permettent pas de satisfaire durablement les conditions de son maintien dans la phase actuelle (celà vaut notamment pour le retour à la 2ème phase d'Etats comme la Grêce qui devraient pouvoir reprendre leur monnaie nationale en conservant l'euro comme monnaie commune conformément aux suggestions formulées par des économistes comme Jacques Sapir),
c) instituer une 4ème phase (cf. à cet égard Une réponse politique et institutionnelle à l'instabilité et à l'insécurité créée par l'incapacité de répondre efficacement aux chocs financiers systémiques), phase d'intégration fiscale et budgétaire qui déterminera les conditions cadres requises pour l'émission d'Euro-obligations et pour une réforme générale des prélèvements obligatoires (cf. à cet égard De l'hypothèse d'un "emprunt européen" à la nécessité d'une réforme générale des prélèvements obligatoires en Europe ! (nouvelle édition)) ; si celà s'avérait nécessaire, cette quatrième phase pourrait être instituée au moyen de l'instrument de la coopération renforcée (dès lors qu'au moins 9 Etats membres de l'eurozone satisfaisaient aux critères d'adhésion à cette phase d'intégration fiscale et budgétaire), après avoir procédé aux décisions requises pour remédier aux défaillances du Traité de Lisbonne en recourant à la clause de flexibilité (Traité de Lisbonne : La clause de flexibilité),
Si de telles évolutions avaient été envisagées par le Conseil européen, nul doute qu'elles auraient reçu l'aval des autres institutions communautaires ainsi que celles des parlements nationaux ; ce qui aurait alors permis d'éviter d'ouvrir un exercice périlleux de négociation d'un nouveau traité sur des bases hasardeuses !
Sur un plan plus général, parce qu'une véritable globalisation stratégique est à l'oeuvre qui met en scène des jeux d'acteurs et des processus qui ne se limitent pas aux seuls dynamiques de marchés, de transactions, de régulations et de médiations, il importe plus que jamais de soutenir la dimension politique de l'Union et de sa monnaie.
L'Union européenne, et notamment l'Eurogroupe, ont plus que jamais besoin de se penser et d'agir en acteur politique et stratégique cohérent au sein d'une économie mondiale qui est explosive (cf. Economie et finance mondiales : Etat des lieux, perspectives et prospectives ! ; Six questions pour comprendre les marchés des changes (Le Figaro) - nouvelle édition - ainsi que Dollar contre euro : la bataille d'Athènes) !
Un acteur qui, à l'image des Etats-Unis, de la Chine ou du Japon, ne se contente pas de déclarations, de mesures normatives et d'instruments généreusement ouverts à tous ses partenaires, notamment à ceux qui ont le privilège de jouir du statut de partenaire stratégique et/ou du régime du "tout sauf les institutions" !
Un acteur qui se pense et agit en Union politique et stratégique mue par des buts ambitieux, des objectifs
clarifiés et pérennes, des principes et des valeurs à la fois partagés et respectés, et des intérêts clairement identifés qui ne se diluent pas dans la grande bleue dès les premiers orages
!
Autant il est nécessaire de consolider l'Union économique
et monétaire et la monnaie unique, autant il est devenu indispensable d'en étayer la double dimension politique et stratégique en les articulant sur une Union politique et stratégique cohérente
elle-même bâtie, à l'image de l'UEM, sur des conditionnalités institutionnelles et des orientations d'un concept stratégique irréductible à un concept propre à d'autres organisations
internationales (telles que celui de l'Otan, par exemple) ! L'heure est également venue de Relancer sans délai le projet d’Union
politique autonome pour éviter le rétrécissement stratégique de l'Europe ! Ce qui nécessite d'abord de se poser les
bonnes questions à cet égard (cf. Interrogations préalables à l'établissement d'un ‘concept stratégique global’ pour la politique
de Sécurité de l'Union européenne ainsi que
Vouloir bâtir une Europe politique comporte des exigences irréductibles ! (nouvelle édition)).
Affirmer être un acteur global dans le monde n'est suffisant : Encore faut-il agir avec une volonté sans faille pour qu'il en soit effectivement ainsi. Nous en sommes encore loin bien !
La tâche est d'autant plus ardue que des jeux parasites se développent au sein des Etats qui nourrissent une opposition de principe à une telle orientation (cf. à cet égard Europe politique : un espoir est-il raisonnable ? par Alain Richard (Revue Politique étrangère)) ! Que les institutions européennes 'compétentes' poursuivent des buts et mènent des actions qui paraissent en opposition avec une telle ambition (cf. Les 7 péchés capitaux de la PESC !) ! Et que les Etats-Unis semblent tirer un réel parti des difficultés de la zone euro (cf. Les Etats-Unis, grands gagnants de la crise européenne, par Françoise Garteiser (La Chronique Agora)).
Les batailles doivent par conséquent être engagées sur plusieurs fronts !
Toutes ne seront pas perdues !
Mais à la double condition que le Conseil européen, en toute liberté, n'aie pas peur d'aller jusqu'au bout de sa pensée et qu'aux mots soit enfin préférée la chose !
L'Union européenne dispose-t-elle aujourd'hui de leaders politiques en capacité de mener de tels combats ?
Plus que jamais "Nous avons besoin d’hommes capables d’imaginer ce qui n’a jamais existé "
L'Histoire nous a enseigné que les véritables Hommes d'Etat se révèlent souvent dans les circonstances les plus dramatiques.
La Chancellière Angela Merkel ne vient-elle pas d'appeler à plus d'Europe pour sortir de la crise ? (cf. Plus d'Europe pour sortir de la crise, selon Angela Merkel (Touteleurope.eu) )
Montrons que nos principes et nos valeurs démocratiques sont encore bien vivants !
N'ayons pas peur d'engager un grand débat démocratique sur ces questions (cf. Lançons un véritable audit public des responsabilités à l'égard des crises systémiques qui obscurcissent nos vies et nos horizons ! ainsi que Grand débat sur la réponse européenne à la crise, à la Maison de la Chimie, Paris, le 6 mars 2012 ) !
Et ensuite, sachons trancher en repartant sur les deux jambes, les yeux ouverts, la tête haute et le coeur vaillant !
Voir également sur ce blog :
* "Solidité, stabilité", les règles de l'euro selon Angela Merkel
* Rapport sur la stabilité financière dans le monde (GFSR - octobre 2010) - nouvelle édition -
* Retour sur images : Les pays émergents vent debout contre la Fed (La Tribune - 04 novembre 2011)
* Crise de la dette en Europe : l’action des agences de notation en question (Vie-publique.fr)
* De cette autre Europe proposée par le Manifeste de Confrontations
Europe
* Retour sur image : Gouvernance
économique : il faut donner un cadre conceptuel et doctrinal clair à la revitalisation de l'UEM ! (1)