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Regards citoyens

Ce blog est destiné à stimuler l'intérêt du lecteur pour des questions de société auxquelles tout citoyen doit être en mesure d'apporter des réponses, individuelles ou collectives, en conscience et en responsabilité !

Retour sur image : Outre-Rhin, la régionalisation exemplaire, par Yves Le Drian (Le Monde)

Depuis des semaines, notre pays est comme tétanisé par la double menace d'une dégradation de sa note de confiance et de l'aggravation du différentiel de taux avec l'Allemagne. Du coup, cette recherche effrénée de comparabilité avec notre grand voisin aboutit à une désespérante conclusion : l'avantage comparatif définitif de l'Allemagne serait sa rigueur financière et budgétaire et la sévérité de l'effort collectif consenti par sa population. Je veux ici souligner que cette seule analyse est à la fois dangereuse et superficielle.

Oui, le système productif allemand est plus performant que le nôtre, du fait notamment de la puissance de son tissu d'entreprises de taille moyenne, plus innovantes et plus internationalisées que les nôtres. Oui, la vitalité et la créativité de l'économie allemande sont supérieures à ce que l'on trouve en France. Sans doute le savoir-faire allemand y est-il pour beaucoup, mais ne veut-on pas voir, aussi, combien la structure fédérale allemande est une part majeure de l'explication ?

S'il existe des entreprises de taille moyenne réparties sur tout le territoire allemand, c'est que ce pays, par son organisation fédérale, leur offre un environnement particulièrement favorable, qu'il a permis le développement d'un système financier régional, et, en retour, assuré un ancrage territorial profond de ses industriels. A l'inverse, comment ne pas noter la corrélation entre le centralisme français et une structure d'entreprises qui ne laisse quasiment aucune place entre des champions mondialisés et parisiens du CAC 40 et des PME de trop petite taille qui ne peuvent grandir faute de financements localisés ?

Oui, le système institutionnel allemand inspire une plus grande confiance que le nôtre parce qu'il est plus moderne. Par son niveau de décentralisation, il assure une meilleure respiration démocratique, des espaces pertinents d'expression et d'élaboration de projets collectifs, une meilleure prise en compte des particularismes locaux et, sans doute, une meilleure implication des citoyens dans la vie de leurs cités.

Oui, enfin, le système allemand jouit d'un avantage comparatif en matière de cohésion sociale, du fait, là aussi, d'une démocratie sociale avancée, dynamique et qui s'épanouit dans un cadre régionalisé. Dès lors, la régionalisation n'est pas uniquement un enjeu pour les régions, elle est un enjeu pour la France. La question n'est pas de recueillir plus de pouvoirs ou plus de moyens pour les 26 conseils régionaux, elle est de donner un souffle nouveau à notre démocratie et de se donner les moyens de la performance collective que la mondialisation nous impose.

C'est pourquoi la décentralisation doit être l'un des grands enjeux politiques de la prochaine campagne présidentielle, comme elle le fut en 1969, sous l'impulsion du général de Gaulle, puis en 1981, à l'initiative de François Mitterrand. Elle fait partie des projets phares de François Hollande. La décentralisation doit être une régionalisation. Elle doit donner aux régions de France la possibilité et les moyens de bâtir et de mettre en oeuvre de vrais projets de territoire, elle doit leur reconnaître pleinement une fonction de collectivité stratégique et d'autorité organisatrice du développement et de la cohésion territoriale. Elle doit enfin, dans une conception moderne de la décentralisation, admettre le principe de la différenciation territoriale, c'est-à-dire une capacité, dans le cadre fixé par la loi républicaine, à adapter les règles et les normes aux besoins réels des régions, au regard de leur histoire, de leur identité, de leur vocation.

 

Agrégé d'histoire, président (PS) du conseil régional de Bretagne, soutien de longue date de François Hollande, Jean-Yves Le Drian préside la Conférence des régions périphériques maritimes d'Europe.

 

Cet article a été publié sur ce blog une première fois le 18 décembre 2011.

 

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