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Regards citoyens

Ce blog est destiné à stimuler l'intérêt du lecteur pour des questions de société auxquelles tout citoyen doit être en mesure d'apporter des réponses, individuelles ou collectives, en conscience et en responsabilité !

Pour Michel Barnier, "il s'agit d'aller vers une fédération européenne", par Jean Quatremer (Libération)

La Banque centrale européenne ne peut à elle seule ramener le calme sur les marchés. Une monnaie ne pouvant survivre longtemps sans Etat, la zone euro a décidé, en juin, d’accélérer son intégration financière et politique. Dans un premier temps, il s’agit de créer une «union bancaire», les banques étant à l’origine de la crise de la dette. A Libération, Michel Barnier, commissaire européen au Marché unique, annonce que la zone euro sera dotée en janvier 2013 d’un superviseur bancaire unique, tâche qui sera confiée à la Banque centrale européenne (BCE), chargé de surveiller les 6 000 banques de la zone euro. Quelques mois plus tard, la garantie européenne des dépôts des ménages et un fonds de résolution des crises bancaires seront en place. Pour Michel Barnier, l’Union européenne doit se transformer en fédération d’ici à 2016. Ou disparaître. 

L’union bancaire européenne, c’est pour quand ? 

Les chefs d’Etat et de gouvernement ont décidé, en juin, que, pour que le Fonds européen de stabilité financière (FESF) et le Mécanisme européen de stabilité (MES), son successeur, puissent aider directement les banques, il était nécessaire de créer une supervision européenne directe. Si on soutient collectivement nos établissements, il est logique qu’on les surveille collectivement. En outre, cela permettra de briser le cercle infernal qui voit la dette bancaire alimenter la dette publique puisqu’aujourd’hui la zone euro ne peut prêter de l’argent qu’aux Etats. Nous travaillons d’arrache-pied pour que notre proposition de règlement soit sur la table du Conseil des ministres et du Parlement européen début septembre. J’espère qu’il pourra être adopté en procédure d’urgence avant la fin de cette année. En clair, en janvier 2013, il y aura un superviseur intégré unique au niveau de la zone euro, une tâche que nous voulons confier à la BCE. 

Ce contrôle européen concernera-t-il tous les établissements financiers ? 

Il y a environ 6 000 banques dans la zone euro et elles doivent toutes être soumises à la supervision de la BCE. Si on ne prend que les banques dites «systémiques», comme certains le proposent, Northern Rock, Dexia ou encore Bankia n’y sont pas. Or c’est ce type d’établissements qui est à l’origine de la crise. Comme la BCE ne peut pas tout faire, il faut que nous déterminions qui exercera, sous son autorité, la surveillance quotidienne de ces banques. 

L’autorité chargée de la résolution des crises bancaires ne pourra pas être la BCE, puisqu’elle devrait prendre des décisions de nature politique… 

C’est certain. D’autant que, dans ce cas, le superviseur aurait fait des erreurs : il ne serait donc pas le mieux placer pour les corriger. Il y a une logique à ce qu’à côté de la BCE, il y ait une «autorité de résolution» qui pourra s’appuyer sur le MES. 

Qu’en sera-t-il de la garantie européenne des dépôts et du fonds de résolution des crises bancaires également prévus par l’union bancaire ? 

Nous allons examiner les propositions actuelles sur la garantie européenne des dépôts et la résolution bancaire, puis proposer de les modifier à chaque fois que c’est nécessaire pour les adapter à ce nouveau projet beaucoup plus ambitieux. Notre objectif est que l’union bancaire au sein de la zone euro soit complète courant 2013. 

Le scandale du Libor, taux de référence du marché interbancaire, montre, une nouvelle fois, les ravages de l’autorégulation… 

Des index [comme celui du Libor, ndlr], qui n’étaient pas considérés comme des instruments financiers, ont donné lieu à des manipulations scandaleuses avec des conséquences importantes pour les épargnants, les entreprises, les Etats. Nous avons donc décidé de compléter notre projet de règlement sur les abus de marché en cours de discussion, pour imposer aux Etats de sanctionner pénalement ces manipulations, y compris par des peines de prison dans les cas les plus graves. Il faut, à mon sens, aller plus loin en mettant en place a minima une supervision publique rigoureuse de ces index qui sont des biens publics. Plus généralement, je suis convaincu qu’il ne peut pas y avoir d’autorégulation sur les marchés financiers. Je ne crois pas à ce dévoiement du capitalisme. Depuis vingt ans, les marchés se sont cru tout permis, parce qu’on leur a tout permis en détricotant les régulations existantes. Ce temps est révolu : aucun acteur n’échappera à une régulation publique, ils doivent le savoir. Nous sommes en train, à grande vitesse, de reconstruire ce qui a été défait. 

L’Union ne réagit-elle pas trop peu trop tard face aux marchés ? 

L’Europe a beaucoup fait en peu de temps pour corriger les faiblesses accumulées depuis dix ans et affronter aux défis du futur, notamment en créant une union économique à côté de l’union monétaire. Nous le faisons avec nos institutions, qui sont complexes puisque nous ne sommes pas un Etat fédéral : à coup sûr, cela prend du temps, le temps de la démocratie, un temps plus long que celui des marchés. Maintenant, il s’agit d’aller vers une fédération européenne, car la crise a montré qu’on ne pouvait pas s’en sortir tout seul. Le temps nous est compté : d’ici à 2016, l’Union devra s’être transformée en une fédération des Etats européens dans laquelle les nations mutualiseront leurs destins sans effacer leurs différences. Une fédération, cela veut dire une gouvernance économique, une gestion collective de nos orientations budgétaires, une union bancaire, une politique industrielle, un budget beaucoup plus fort. Cette fédération devra aussi se doter de nouvelles institutions, comme un ministre des finances ou un président de l’Union élu par le Parlement européen avant de l’être au suffrage universel.

 

 

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