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Publié par ERASME

Un collectif d'internautes passe son temps libre à récolter et publier des informations issues des services publics, parfois inédites. Interview de Regards-citoyens.org (NDLR : à ne pas confondre avec Regards-citoyens.com, notre blog) !

Regards citoyens (lire Regards-citoyens.org) est une association qui publie des données publiques que l'administration voudrait parfois garder pour elle. À son actif, le projet NosDéputés.fr notamment, qui avait suscité la colère du président de l'Assemblée nationale car il mettait en lumière l'absentéisme de certains élus. Vendredi 26 novembre, l'association lance une "chasse aux trésors" pour recenser les données publiques disponibles et lancer de nouveaux projets. Le Point.fr s'est entretenu à Paris avec l'un des fondateurs de Regards citoyens, Tangui Morlier. Son cheval de bataille : l'OpenData.

Le Point.fr : Qu'est-ce que l'OpenData ?

Tangui Morlier : L'OpenData, c'est l'accessibilité des données publiques. Cela a trois avantages : l'innovation économique, l'implication des citoyens et l'échange de données entre les différentes structures. Ce dernier aspect est très important. Par exemple, nous avons obtenu des données électorales du ministère de l'Intérieur, qui contiennent quelques inévitables erreurs de saisie. En discutant avec le Cevipof, nous nous sommes rendu compte qu'ils disposent d'un logiciel pour corriger ces erreurs statistiques... mais que le ministère de l'Intérieur ne dispose pas des données corrigées.

Pourquoi cette "chasse aux trésors" des données publiques ?

Nous voulons recenser les données existantes et ce qu'on a le droit de faire avec. Par défaut, n'importe quel citoyen peut accéder à n'importe quel document administratif tant qu'il ne contient pas d'informations nominatives ou d'opinions sur une personne. Mais l'administration peut décider d'accoler des licences, notamment pour participation aux frais d'utilisation.

Concrètement, comment faites-vous pour récolter les données ?

C'est plus ou moins simple selon les cas. Il suffit parfois d'un coup de fil pour convaincre un fonctionnaire de transmettre des données publiques. Mais dans certains cas, si un fonctionnaire n'est pas obligé par le droit ou par sa hiérarchie, il préfère ne pas donner suite, peut-être parce qu'il ne veut pas prendre de risque. Là, nous sommes obligés de saisir la CADA (Commission d'accès aux documents administratifs). Mais cette commission n'a pas de pouvoir d'injonction. Et quand une administration prétend que des données n'existent pas pour éviter de nous les transmettre, la CADA n'a pas le droit d'enquêter sur le terrain. Nous espérons un jour un message politique clair qui inciterait les administrations à transmettre les données plus facilement, comme aux États-Unis.

Justement, comment ça marche à l'étranger ?

Les pays anglo-saxons sont très en avance, ils ont une réelle volonté politique de donner accès aux données publiques. Barack Obama a donné le coup d'envoi dès son arrivée au pouvoir, et beaucoup de données sont disponibles sur le portail data.gov. Mais la situation n'est pas idéale pour autant. Au départ, les données concernaient l'administration de George W. Bush et ne dérangeaient donc pas trop l'exécutif en place. Depuis que les données commencent à concerner l'administration actuelle, on voit revenir quelques réticences... En Grande-Bretagne, les données étaient payantes jusqu'à très récemment, mais elles ont aussi été ouvertes dans un souci de transparence.

Alors l'OpenData en France, c'est pour bientôt ?

Certaines villes françaises comme Rennes, Nantes ou Paris semblent vouloir se lancer de leur côté. Mais à l'échelle nationale, c'est l'arlésienne du data.gov à la française. Même si Nathalie Kosciusko-Morizet (ex-Secrétaire d'État à l'Économie numérique) avait fait mine de pousser le projet, son cabinet n'était pas favorable à l'ouverture des données publiques, mais seulement à leur référencement. L'administration semble préférer une solution payante, et l'APIE (Agence du patrimoine immatériel de l'État), connue pour avoir vendu la marque du "Louvre" à Abou Dabi, milite pour commercialiser les données publiques. C'est une tradition française, en quelque sorte, avec les données cartographiques de l'IGN ou les prévisions de Météo-France. C'est regrettable, d'autant plus que lorsque les données étaient payantes en Grande-Bretagne, c'étaient surtout les administrations elles-mêmes qui les achetaient...

Vous avez dénoncé un article du projet de loi Loppsi 2. Pourquoi ?

L'article 30 ter veut introduire un contrôle de moralité sur les utilisateurs des données publiques sous licence. Ces contrôles de moralité sont aujourd'hui réalisés par des agents de police pour des recrutements à des postes touchant à la sécurité nationale par exemple. Cela montre une méconnaissance du domaine par le législateur, qui souhaitait probablement éviter les abus. Mais je ne pense pas que ce soit une volonté de museler les projets comme Regards citoyens. Quoi qu'il en soit, c'est dangereux pour nous, et c'est contraire à la directive européenne PSI (Public Sector Information).

Comment avez-vous créé Regards citoyens ?

Nous sommes quatre cofondateurs et nous avons commencé à nous réunir dès juillet 2009 autour du projet NosDéputés.fr, l'observatoire citoyen de l'activité parlementaire. Notre association compte une dizaine de membres pour une dizaine de projets, et nous sommes tous bénévoles. Nous payons même de notre poche pour l'hébergement des sites web. Nous devrions trouver quelques sources de revenus via des partenariats, peut-être avec Sciences Po.

Source : http://www.lepoint.fr/high-tech-internet/regards-citoyens-revele-les-secrets-des-administrations-25-11-2010-1267201_47.php

 

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