Pour une analyse approfondie du comportement des médias à l'égard des évènements qu'ils relatent puis ... oublient avec la même démesure - nouvelle édition -
La surmédiatisation des souffrances, des meurtres, des tensions et des crises internationales,
etc., ainsi que celles et ceux de la surmarchandisation de l'information et de l'image qui l'accompagne interpelle d'autant plus que l'autisme et le mutisme qui leur
succèdent lorsque " la bise est venue " connaissent la même démesure !
En France, par exemple, que dit-on de la situation au Japon (où la
variété, la simultanéité et la violences, des effets traumatiques systémiques des crises en cours mériteraient un autre traitement médiatique,) en Irak (où rien n'est réglé malgré la
mobilisation de dizaines de milliards de dollars dont on ne trouve pas grand chose sur le terrain), en Afghanistan (où tout va au plus mal), au Kosovo (à l'égard duquel les choix arrêtés par la
Communauté internationale s'avèrent in situ quelquepeu inappropriés), dans les Balkans occidentaux (où les mafias prospèrent ...), en Malaisie, au Tchad, en République
centrafricaine, au Darfour, au Nigéria, en Côte d'Ivoire, en Colombie, au Mexique, à Gaza (où la situation demeure terriblement dramatique), au Japon, ou encore, printemps arabes
obligeant, en Egypte, à Bahrein, en Algérie, en Tunisie, au Yemen, en Jordanie, en Syrie, en Egypte, en Lybie (où rien de ce qui avait été annoncé comme une promesse pour le peuple
lybien n'est au rendez-vous), ... .
Autant de théâtres, de crises, et partant, de 'sujets' qui, bien qu'il aient défrayé les chroniques et occupé la
une de tous les médias de France et de Navarre pendant des semaines et des semaines, parfois davantage, sont soigneusement "oubliés" par les rédactions parisiennes et régionales alors que
bien des souffrances et bien des questions à leur égard demeurent sans réponse.
Que les médias privés prennent délibérément le parti de "tourner la
page" n'a en soi rien de condamnable, bien évidemment, quand bien même celà peut surpendre le citoyen soucieux d'être tenu régulièrement et 'honnêtement' informé de ce qui se passe dans ce
village global qui s'appelle Monde !
Mais que les médias publics agissent de la sorte est purement et simplement inacceptable !
Ne serait-ce que parce que de tels phénomènes suscitent des craintes extrêmement fortes quant à l'existence de connivences plus ou moins étroites (voire parfois de collusions)
entre des groupes d'intérêts particuliers et ceux qui ont à la fois mandat démocratique et pouvoir politique de veiller à l'indépendance et à la qualité intrinsèque de l'information et
de la communication que les opérateurs de service public ont vocation à délivrer au sein des espaces sociaux et démocratiques dont les uns et les autres tirent à la fois
leur cahier des charges, leur légitimité et leurs ressources.
De tels phénomènes participent à une profonde dépréciation de
la triple valeur informative, explicative et symbolique du verbe, du regard, de l'image, du dialogue, de l'interprétation, de l'analyse et du débat au mépris même du premier des droits
fondamentaux, celui du respect de la dignité humaine !
Aussi, afin de mieux en comprendre les mobiles, les ressorts, les déterminants, comme les limites,
j'appelle à une exploration aussi savante que celle dont fit montre Umberto Eco lorsqu'il explora dans un ouvrage éponyme - avec quelle maestria ! - les
'limites de l'interprétation' en littérature et en philosophie.
Comme il le fit à l'égard de ces deux champs particuliers de l'éloquence et de
la connaissance, interrogeons-nous à l'égard des dérives éhontées des médias à l'égard de ce qui constitue désormais un droit fondamental en Europe (Article 11 de la Charte européenne des Droits
fondamentaux : Liberté d'expression et d'information : 1. Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté
de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontières ; 2. La liberté des médias et
leur pluralisme sont respectés.)
Comme Umberto Eco à propos de la sémiotique appliquée à la littérature et
à la philosophie, sachons proposer des réponses courageuses et lucides à des questions aussi fondamentales que peuvent l'être les suivantes, par exemple :
- La communication comme l'information peuvent-elles se pervertir, dévier de leur route et tomber dans l'excès ?
- Qu'est-ce qui distingue « utilisation » et « interprétation » d'un fait, d'une image, d'un commentaire, d'une déclaration, d'une information ?
- A quoi reconnaît-on qu'une interprétation, un commentaire construit, un regard porté, est juste ou erroné ?
- Que penser des médias, des politiques (des marchands de sable) qui « déconstruisent » le fait, l'image, le discours pour mieux l'utiliser ?
etc.
NB : Cet article a déjà été publié sur ce blog le 04 octobre 2009 et le 30
janvier 2010
Voir également sur ce blog les articles suivants :
* Qu'est-ce que la médiacratie ?
* La nouvelle condition humaine d'après Auschwitz, par Gilles
Bernheim ;
* Savoir s'accommoder d'une rumeur invérifiable
pour justifier l'injustifiable ... ;
* Liberté de la presse : classement mondial 2006.
* "Dix stratégies de manipulation" (de masses), de Noam Chomsky
* "La vérité si j'mens" : un programme qui ne fait recette nulle part !
* Nucléaire iranien : il faut en finir avec l'irrationnel, par Yusaf Butt (Slate-Foreign Policy)
* "Les soldats français en Afghanistan sont frustrés que personne ne s'intéresse à eux" (Atlantico.fr)