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Publié par Patrice Cardot

Ci-après sont proposés des extraits ainsi que quelques commantaires d'un article paru dans la revue De Defenza qui rend compte d'un mémorandum interne dit "Info-Memo" de John Young, sous-secrétaire à la défense pour les acquisitions, la technologie et la logistique, adressé le 16 janvier 2009 au secrétaire à la défense Robert Gates, qui, en donnant un résumé de l'appréciation du programme JSF à l'heure où celui-ci est officiellement déclaré légalement en infraction à la loi Nunn-McCurdy, qui vise tous les programmes du DoD ayant dépassé leur devis de développement et de production de 30%, permet de bien fixer les conditions historiques et fondamentales du programme F35 - JSF (Joint Strike Fighter), et surtout de ses vices structurels de conception et de réalisation.

Le mémorandum de J. Young trace un rapide portrait de ce qui peut être désormais considéré comme une "catastrophe annoncée", et met en cause la méthodologie suivie dans le développement du programme.


J. Young y précise que le programme a dépassé son devis initial - il s'agit là des chiffres officiels, connus et d'ores et déjà contestés - à partir d'un programme estimé à $229 milliards en 2001 jusqu'à un programme de $298 milliards aujourd'hui, soit $69 milliards de dépassement (soit les 30% de dépassement évoqué ). Or ce dernier chiffre de $298 milliards est largement contesté, notamment par le GAO. Le Star Telegram indique: «New estimates, expected to be released soon, are expected to show further cost growth.». Certaines sources affirment que le GAO annoncerait une évaluation du coût du programme JSF à hauteur d'au moins $339 milliards dans son prochain rapport sur le JSF, sans doute en mars.


Outre la question du dépassement de coût, le principal problème que le sous-secrétaire à la défense relève, dès l'origine de la phase actuelle, c'est-à-dire 2001, est le fait qu'il ait été développé une structure d'avion pour un autre avion que ce que le JSF est devenu.  « JSF technology demonstrators were not adequately robust, leading to optimistic estimates of the structural weight of the aircraft. » Most importantly, we should have built quality prototypes in the 1996-2001 time frame. [...] JSF did not built true prototypes built as was done in the YF-22 and YF-23 fly off. To be clear, the future of the JSF cost growth was largely written in 2001 when an budget pricing decisions were made in 2001 based on the inadequate knowledge gained from the JSF technology demonstrators

Mis à part ce travers fondamental, qui est un travers de méthode, d'autres causes sont citées pour le dépassement de coût de l'avion (augmentation des matériaux, coût des délais pour modifications structurelles, réduction de la commande de la Navy, etc.).

Parmi elles, il en est une, assez curieusement rédigée : « Lockheed Martin's performance is adequate, but not great. » qui fait apparaître la responsabilité du constructeur dans les dérives du programme. 


Et une autre qui tient aux précisions données sur le déroulement du programme qui soulignent l'importance dramatique du contrôle et de la rétention systématiques des informations relatives au programme, y compris à l'intérieur du Pentagone puisque J. Young affirme que "le département" n'était pas informé : « However, the JSF costs were already higher than estimated because inadequacies in the technology demonstrators led to underestimating the weight of the JSF aircraft -  the Department did not know this at the time. ». Pour autant, il n'est pas certain qu'il y ait eu systématiquement et volontairement contrôle et rétention de l'information, notamment de la part de Lockheed Martin (LM) ou du JSF Program Office (JPO), vis-à-vis de la direction du Pentagone. Par contre, il est tout à fait possible que personne n'ait vraiment été en capacité d'apprécier les dérives d'un programme auquel tout le monde était incliné à accorder sa confiance.

Outre ces considérations, ce document présente également l'originalité d'offrir une vision inhabituelle sur la situation qui règne au sein du Pentagone.

Mais une question demeure : pourquoi John Young a-t'il écrit ce mémorandum qui met en cause d'une manière aussi violente le programme JSF et le fonctionnement aléatoire du Pentagone ?

Je ne me hasarderai en aucune manière à apporter une quelconque réponse à une telle question. De nombreuses hypothèses courent à cet égard.

Comme je ne préjugerai pas des suites qui seront réservées par la nouvelle administration américaine au programme JSF dans le contexte crée autant par les très grandes difficultés budgétaires que par les tensions très fortes qu'a fait naitre un tel document entre les différents protagonistes de ce programme.  


Pour autant, j'ai le sentiment amer que ce genre de catastrophe annoncée est également possible en Europe à propos de programmes, européens ceux-là, si tant est qu'aujourd'hui on puisse encore oser qualifier de "programme européen" quelque programme que ce soit, y compris dans les domaines dits de souveraineté tant les interpénétrations technologiques, industrielles et financières, et donc les dépendances, sont omniprésentes ; comme le JSF ne peut être perçu comme totalement américain comme le savent ceux qui, en Europe, ont à pâtir doulouresuement des déboires de ce programme ; son échec entrainant avec lui à la fois l'affaiblissement de nombreux industriels et opérateurs technologiques européens et le passage par pertes et profits d'investissements publics gérés de manière aussi irresponsable que l'ont été les finances publiques de nos Etats depuis plus d'une génération !

 

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