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Publié par ERASME

P. de Suremain met brillamment en perspective la crise politique ukrainienne dans son contexte géopolitique. Cette crise est un révélateur des tensions qui traversent notre continent. Il en dégage le sens et précise les enjeux.      

EN REFUSANT ex abrupto de signer fin novembre 2013 à Vilnius l’accord d’association qu’Ukrainiens et Européens croyaient acquis, le Président ukrainien Victor Ianoukovitch a provoqué une onde de choc dont nul n’a prévu les conséquences. Un moment de vérité. Pour l’Ukraine, pour l’Union européenne, pour la Russie. La réaction immédiate de la rue par son ampleur a changé la donne. Tous les acteurs se sont trouvés pris à contre pied.

En Ukraine, c’est l’irruption d’une crise latente depuis longtemps qui a crée la surprise, en résonance avec la Révolution Orange, tout aussi spontanée, dirigée contre le même homme, au nom des mêmes valeurs : indépendance, justice et démocratie. Mais le contexte a changé.

En 2004, c’est une élection truquée qui a soulevé les foules sous la conduite de leaders reconnus, Victor Youchenko et Youlia Timochenko.

En 2013, c’est le choix de la Russie contre l’Europe par un Chef d’Etat légitimement élu qui a indigné l’opinion, obligeant l’opposition et ses dirigeants à surmonter leurs divisions pour faire front.

Le drapeau européen a remplacé la bannière orange

La détermination des manifestants est à la mesure de leur exaspération devant la corruption du pouvoir, incapable de mener les réformes promises et de ce fait discrédité à l’intérieur comme à l’extérieur. Ceci au point que nombre d’oligarques, dérangés par l’irrépressible avidité de la « la famille » du Président, sa verticale du pouvoir, semblent se démarquer de celui qu’ils croyaient leur rempart : l’actuelle liberté de ton des média qu’ils contrôlent surprend. Les voilà qui viennent en appui aux réseaux sociaux d’une redoutable efficacité. Les étudiants ont donné l’impulsion, rejoints par les plus âgés, alors que c’était l’inverse en 2014. Le drapeau européen a remplacé la bannière orange, mais dans les deux cas ce sont bien les revendications politiques et éthiques et non sociales qui s’expriment, une mobilisation civique pour un choix de société. Ce qui reste à traduire en un programme qui permette enfin de transformer l’essai. Cette crise est aussi un révélateur des tensions qui traversent notre continent, entre l’U.E et la Russie, entre celles-ci et l’Ukraine, à qui il faut faire sa place.

Moscou redoute l’effet de contagion

Le Kremlin a fait de l’Ukraine une question existentielle, non seulement par nostalgie du statut perdu de super puissance et de la grandeur impériale, mais aussi par souci de préserver la nature du régime : la verticale du pouvoir intimide plus qu’elle séduit et ne propose pas un modèle très attrayant aux pays en transition. Le Président Poutine qui a perçu la Révolution Orange comme un revers majeur et garde en mémoire les manifestations de décembre 2011 à Moscou redoute l’effet de contagion d’un pays aussi proche de la Russie gagné par l’osmose européenne. L’échec infligé aux Européens, préparé par une guerre économique préventive est sans nul doute un succès pour Moscou, mais en tirera-t-elle tout le bénéfice escompté si l’instabilité perturbe le principal de ses voisins ? L’Ukraine n’est pas l’Arménie et l’objectif prioritaire que s’est fixé le Président Poutine d’une Union Eurasienne qui contrebalance l’U.E. ressentie comme une menace n’est pas gagnée. La Russie a-t-elle à terme les moyens de ses ambitions ? Les Européens ont été eux aussi désarçonnés par la volteface de Viktor Yanoukovitch qu’ils n’ont pas su prévenir. Persuadé que le refus par la Rada de permettre la libération de Youlia Timochenko obligerait l’UE à s’opposer à la signature de l’accord d’association, le voilà lui-même contraint à en assumer l’échec. L’activisme des plus fervents avocats de l’Ukraine, les nouveaux entrants, Pologne en tête a prévalu sur les réticences des anciens, tous devenus plus conscients de la portée politique de l’évènement, du fait même de l’opposition russe.

La situation présente doit inciter les Etats membres à plus de cohésion vis à vis de la Russie.      

Il n’est plus temps d’esquiver l’attraction qu’exerce l’Europe, malgré ses états d’âme sur ceux qui aspirent à la rejoindre et tout le moins à y puiser leur inspiration et y trouver leur modèle. La politique de voisinage quelque peu improvisée et qu’a refusée en son temps la Russie (pas de voisinage commun) puis le partenariat oriental, mieux ciblé mais mal financé n’ont pas été à la mesure de l’enjeu. La situation présente doit inciter les Etats membres à plus de cohésion vis à vis de la Russie qui dépend autant, sinon plus de l’UE que celle-ci de la Russie. Ce qui suppose de notre part une vision commune de l’Ukraine, carrefour stratégique de notre continent, appelé à être la clé de voûte de la future Europe plutôt que le champ clos de ses vieilles rivalités.

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Voir la suite de cet article : http://www.diploweb.com/L-Ukraine-une-crise-politique-qui.html?utm_source=sendinblue&utm_campaign=NEWSLETTER_4__151212013&utm_medium=email

A propos de la relation entre l'Union européenne et l'Ukraine :

 * Accord d'association : Une nouvelle feuille de route pour l'Ukraine   

 * La probabilité d'une faillite de l'Ukraine augmente, par Aline Robert (Euractiv.fr)  

A propos de la relation entre l'Union européenne et la Russie :

 * Alain Lamassoure juge que l'Europe devrait définir une doctrine sur la Russie      

A propos du partenariat oriental : 

 * UE/Partenariat oriental : Vilnius: un "partenariat" ambigu ?
A l'égard de la stratégie d'élargissement :
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